Atelier d'écriture 2021-2022

Retrouvez les textes produits au cours de la première année de l'atelier, avec les consignes données dans les encadrés introductifs.

Vous disposez ainsi des sujets abordés et des résultats obtenus. Estimez-les, en sachant que les participants s'estimaient des "débutants".

22 juin 2022

Conter une histoire, plutôt plaisante, où la dernière phrase arrive en point d'orgue.

 

Tolstoï et compagnie

Ce jour-là, chacun se creusait la tête pour trouver une histoire à illustrer pour le dernier atelier d’écriture. Nous avions même la présence du correspondant des Informations dieppoises.

Qui serait le plus drôle ? Ça phosphore sec ! Il me prit d’envisager d’envoyer tout le monde sur la piste de la littérature russe pour casser la phobie des Russes qui se répandait depuis la guerre d’Ukraine.

Nous parlerions un temps de Tolstoï qui paraissait devoir faire l’unanimité avec son Anna Karénine et aussi bien son roman fleuve qui raconte la guerre des Russes contre les armées napoléoniennes, Guerre et Paix ; si l’on en croit les historiens, ce fut bien plus terrible que ce qu’il raconte alors. On mangea lors de la retraite de Russie de la viande de cheval crue. Même Napoléon s’en était mêlé et avait, sans le vouloir, soufflé son titre à Tolstoï auquel l’histoire avait été transmise.

Ainsi quand on lui proposait pour la première fois le menu du jour : steak de cheval, il s’était écrié :

- Oui, mais alors guère épais.

Son humeur était on le devine des plus détestables. Ça fit bien rire les Russes lettrés qui parlaient français à l’époque.

 

Où sont les toilettes ?

Nous étions en vacances en famille, il faisait beau, tout se passait bien. Il se trouve que nous avions quelques heures devant nous, ma femme et moi nous décidons d’aller voir des amis à quelques kilomètres de là. Là aussi, super, tout se passe bien, pris par le temps, il fallait rentrer vite.

En cours de route, je suis pris d’une envie de pipi ! Je m’arrête précipitamment sur le bord de la route alors qu’il n’y avait personne, derrière la portière, je sors mon « engin » et là : la fermeture coincée. Impossible. Je ne peux enlever le pantalon. Tellement envie que je n’ai pas pu me retenir : la jambe du pantalon complètement mouillée, on est reparti comme ça à toute vitesse... pour faire sécher !

En arrivant au camping, nos amis nous disent :

— Eh, tiens, André, il y a un marchand de vin qui est passé, bon sauf que l’on manquait de bouteilles.

— Ah oui, je vois bien : la bouteille que vous avez sur la table, c’est la mienne, en effet.

Et là, obligé de me retourner pour éclater de rire. En effet, je la reconnais bien, c’était celle dont je me servais toutes les nuits, du fait de l’éloignement de notre tente par rapport aux toilettes du camping.

 

Promenade risquée

Dans un couvent, un jour de beau temps, deux sœurs décident de faire une promenade dans la forêt voisine.

L’une d’elles est surnommée sœur Mathématiques, car elle s’occupe de la comptabilité ; l’autre, sœur Logique puisqu’elle a toujours de très bonnes idées.

Dès le début de leur balade, sœur Logique annonce :

— Je crois qu’on est suivies, j’entends des bruits de pas derrière nous.

— C’est un homme qui monte assez vite. Dans cinq minutes, il nous aura rattrapées, précise sœur Mathématiques après s’être retournée.

— Marchons plus vite, suggère sœur Logique.

Elles accélèrent le pas.

Au bout d’un moment, sœur Mathématiques regarde derrière elle pour évaluer la distance.

— Oh ! Il monte encore plus vite, dans deux minutes, il sera là !

— Courons, propose sœur Logique.

Elles se mettent à courir toutes les deux, mais réalisant qu’elles allaient entre rejointes, sœur Logique propose :

— Nous arrivons à un carrefour, nous allons nous séparer, il ne pourra en suivre qu’une qui sera sacrifiée… nous nous retrouverons ensuite au couvent.

Un quart d’heure plus tard, elles sont toutes les deux réunies :

— Alors, c’est toi qu’il a suivie, déclare sœur Mathématiques. Que s’est-il passé ?

— Eh bien, il s’est posté devant moi !

— Et alors ?

— Alors, il a baissé son pantalon !

— Et alors ?

— J’ai levé ma robe.

— Oh, et alors ?

— Alors, il est plus facile de courir avec la robe levée qu’avec un pantalon au bas des pieds. Logique !

 

Mariage

C’est le plus beau jour de la vie de mon ami Pascal. Aujourd’hui c’est son mariage avec la jolie Véronique. Cela se passe dans l’église d’Ancourt. L’une des invités est vêtue d’une robe complètement transparente et rose, avec une merveilleuse culotte blanche. Ceci n’est pas mon histoire, mais cela se déroule le même jour.

Étant vidéaste par passion, mes talents reconnus, je suis souvent dans ces années 80 invité par mes amis à des évènements pour filmer leurs mariages, communions ou d’autres spectacles.

À l’occasion de ce mariage, j’ai décidé une nouvelle fois de louer une lourde caméra, comme à l’époque l’on pouvait se procurer seulement chez les photographes dieppois pour le prix de 300 francs, avec une caution de 10 000 francs. Oups, je n’avais pas intérêt de la perdre, cette magnifique caméra.

Tout se passe bien, je filme à l’église, puis à la mairie. La jeune femme en rose : bien !

Puis direction la salle des fêtes de Bellengreville. Tout le monde s’engouffre par la grande porte. Le repas se passe très bien.

Le soir arrive vite, et la batterie de la caméra se vide autant, ou plutôt aussi vite. Je décide de ressortir de la salle des fêtes, afin de me rendre à ma voiture, ramener la seconde batterie que j’avais oubliée sous un siège, bien cachée.

Sans éclairage à l’extérieur, je sors sur le parking ; je remarque des enfants qui jouent sur l’avant du bâtiment.

Je me dirige en direction de mon véhicule. Enfin, c’est ce que je crois car en réalité, je me dirige dans le noir presque complet, vers une petite rivière, qui se situe tout le long de la salle des fêtes. Et plouf ! Me voilà à essayer d’agripper les herbes pour me sortir de ce mauvais pas, la caméra dans une main.

Quand j’arrive à m’extirper du ruisseau, heureusement sans crue, je pénètre dans la salle des fêtes où une dizaine de photos sont prises quand ma femme me demande :

— Pourquoi tu es trempé ? Où l’as-tu mise ?

— Quoi, la batterie ? Je ne l’ai pas. Je suis tombé dans la rivière.

Sous les éclats de rire.

 

Blague à part

Mon épouse adore le chanteur Florent Pagny, malheureusement les places pour le Zénith de Rouen où il va se produire sont actuellement inaccessibles sur Internet. Notre bru se charge alors de régler le problème.

Quelques jours plus tard, je pars chez mon fils ; ma femme me rappelle :

— N’oublie pas les places pour le Zénith.

— Pas de problème, répondis-je.

Sur le Net, ma belle-fille trouve facilement les deux places si demandées.

Le lendemain, mon fils et sa petite famille mangent chez nous et rapidement, dès l’apéritif, ma femme demande si les places ont été prises.

— Mince, j’ai complètement zappé, excuse-moi, j’ai oublié, c’est de ma faute !

Ma belle-fille me regarde, étonnée, mais joue le jeu en affirmant qu’elle n’a pas de place car je ne lui ai rien réclamé. Inutile de vous décrire la réaction épidermique de mon épouse, ou plutôt si, je vous résume quelques phrases :

— Voilà, tu ne m’écoutes jamais. C’est toujours comme ça. Je passe toujours après les autres. Etc.

Le repas se passe avec beaucoup de répétitions au sujet de mes « oublis ». Mon fils me regarde avec sa femme avec un sourire entendu.

Voilà, deux semaines se sont passées, les billets sont réservés mais mon épouse ne le sait toujours pas. Ce n’est que lorsque la famille se réunit une nouvelle fois qu’enfin je dévoile la « blague ». Quel soulagement pour celle qui attendait les billets si convoités.

Le seul compliment qu’on m’adresse ce jour-là est venu de la part de mon fils :

— Tu es trop fort, vraiment, je n’aurais jamais pu tenir deux semaines !

 

Secret de confession

Monsieur le curé est un homme charitable comme on n’en trouve plus : il partage les repas de première communion au risque d’être en retard aux vêpres de l’après-midi ; il conseille aux hommes d’attendre la fin de la messe avant d’aller au café de l’église et aux enfants de venir au catéchisme. Enfin, il se montre complaisant avec les femmes qui se trompent de mari, elles disent : « Je suis tombée dans le chemin de l’église » et il leur donne l’absolution. Tout le monde connaît la combine dans la paroisse et plaisante volontiers de ces arrangements.

Un jour, monsieur le curé tombe malade, il est même hospitalisé et part en cure dans une maison de convalescence. Un jeune abbé est envoyé du séminaire pour le remplacer.

En confession, il entend une première femme se reprocher la gourmandise à cause des cerises mûres dans les arbres et elle est tombée dans le chemin de l’église :

— Oh, ce n’est pas un péché, juste un problème d’équilibre.

— Le jeune abbé est moderne, clame la paroissienne à ses copines ; il est encore plus indulgent que notre père curé.

La deuxième avoue la même chute ; la quatrième et plusieurs suivantes confessent leur regret d’être tombées.

Sortant du temple, l’abbé croise le maire qui surveille les rues de la commune.

— Ah, monsieur l’abbé, vous vous sentez bien chez nous ?

— Oui, monsieur le maire, l’église et le presbytère sont merveilleux.

— Bien, se réjouit le premier élu. Pour une fois que je rencontre quelqu’un qui ne me réclame rien.

L’abbé se perd en confusion et en marques de contentement avant de signaler un problème lié à la voirie municipale :

— Plusieurs paroissiennes se plaignent de chuter dans le chemin de l’église… mais, regrette-t-il, je ne sais ni l’endroit, ni le motif de ces accidents.

— On m’en a déjà parlé, sourit le maire qui connaît le code convenu entre le bon curé et les femmes.

L’abbé laisse un moment de réflexion puis lève les mains au ciel :

— J’y pense, Monsieur le maire, vous n’avez qu’à demander à Madame votre épouse, elle-même est tombée deux fois la semaine dernière !

 

Chute !

Mon amie Édith et moi, nous nous promenions tranquillement dans les quartiers pittoresques du vieux Rouen après avoir fait les magasins.

Un peu fatiguées, nous retournions au parking où nous nous étions garées. En traversant une rue, Édith loupa le trottoir et s’affala de tout son long.

Un homme très gentil se précipita dans l’intention de lui porter secours et lui demanda si elle s’était fait mal. Celle-ci, vexée, lui répondit d’un ton très mal-aimable :

— À votre avis, je me suis fait beaucoup de bien ?

 

Le bouchon

Aujourd’hui, dernière séance de l’atelier d’écriture. Le thème du jour proposé par notre animateur est de raconter une anecdote. Le silence s’installe, je m’exclame :

— Non, je rendrai feuille blanche

Le vide est là. Je regarde autour de moi, les stylos courent sur les feuilles. Que peuvent-ils écrire ? Ils sont tous absorbés et concentrés.

Moi j’attends la fin de la séance, l’esprit loin d’ici. Je suis sur la route des vacances, le soleil brille. Je m’imagine déjà au bord de l’eau, quand tout à coup la voiture ralentit, pourquoi ? La circulation était fluide !

— Ah, s’exclame mon fils, un bouchon…

Ma petite-fille se met sur les genoux, regarde à travers la vitre et cherche sur la route :

— Dis papa, il est où le bouchon ? je ne le vois pas.

 

Les galoches

Je travaillais à Rouen et prenais le train. J’avais de vieilles galoches qui avaient appartenu à la patronne de ma Maman. Il me vient l’idée un jour de les mettre pour aller travailler et amuser la galerie.

Déjà, assez difficile de marcher avec ce genre de godasses avec des clous dessous ; et moi, l’idiote, je n’ai pas pris de chaussures de rechange.

Inutile de vous dire la difficulté, les glissades, je me suis rattrapée souvent. Ah oui, j’ai fait rire tout le monde : l’arrivée périlleuse au bureau, la matinée pénible, je glissais sur le sol.

Je n’imaginais pas que je pourrais faire la journée, le midi, j’allais m’acheter une paire de chaussures normales pour pouvoir reprendre mon travail et revenir chez moi.

 

07 juin 2022

Mettez en scène un objet que vous avez connu dans votre enfance et retrouvé au cours d'une balade (brocante, musée, vide-grenier, etc.)

 

Le chariot des souvenirs

Ô miracle ! Sur cette foire-à-tout, un petit chariot en bois avec son petit matelas, les souvenirs remontent.

À la maison, nous jouions avec mes petites voisines au grillage qui séparait nos jardins, elles de l’autre côté, et nous échangions des propos de petites mamans, avec nos poupées dans le berceau. Moi, c’était un nounours.

Je ne me souviens pas très bien, mais elles avaient des landaus avec des poupées, des biberons et des draps pour couvrir les bébés, c’était déjà la classe au-dessus, leurs parents étaient les employeurs de Maman ! Moi, le chariot en bois avait été fabriqué par l’un de mes oncles ; il y avait une petite couverture, un oreiller, un nounours. Et pendant des heure, cela pouvait durer.

Que pouvions-nous nous raconter ? Certainement les propos de nos parents.

Nous avions aussi des dînettes, et tout était rythmé par passer l’après-midi jusqu’à l’appel des parents. Il fallait rentrer, c’était l’heure de la soupe. Nous nous disions au-revoir comme de grandes dames et nous fixant rendez-vous à demain. Nous nous étions bien amusées, avec peu de choses.

 

Moyen de locomotion

Julia, notre petite-fille, ne connaît pas le petit village du Bec-Hellouin.

Nous décidions alors, un dimanche, de lui faire découvrir ce joli site avec son abbaye.

Après avoir garé la voiture, nous nous promenons à pied pour admirer les belles façades normandes à colombages et passons devant un magasin d’antiquités. Julia s’intéresse à tous ces objets, bibelots, vases, brocs. Nous entrons toutes les deux alors qu’André préfère continuer sa petite promenade.

Dans le fond du magasin, j’aperçois alors, glissé sous une table ancienne, un petit siège posé sur 3 roues, une chaîne et deux bras métalliques pour entraîner le tout.

Je demande à l’antiquaire, il peut le sortir de cette cachette pour le montrer à Julia.

— Qu’est-ce que c’est ? me demande-t-elle.

— C’est l’ancêtre de la petite voiture à pédales, que l’on m’avait offerte pour mes cinq ans !

— C’est un cyclorameur, précise l’antiquaire.

Je me remémore alors les efforts que je devais faire avec celui que j’avais reçu à Noël. C’était très bien dans les descentes, mais sur le plat il fallait vraiment tirer très fort. Pour muscler les bras, c’était idéal.

Heureusement, mon père qui était bricoleur, réalisant que c’était trop dur pour moi, démonta le petit moteur d’un vieux tourne-disque et l’adapta sur cet enfin.

Ouf, après il avançait presque tout seul.

— Génial ! conclut Julia.

 

La lessiveuse

Aujourd’hui dimanche une grande foire à tout anime la commune. Je propose aux enfants d’aller faire un tour après le repas. De stand en stand, nous découvrons des soupières, des vases, des services à café, des carafes que les personnes veulent vendre. Et tout à coup, je vois une lessiveuse. Mon esprit saute les années, j’ai dix ans. C’st la lessive à la maison.

L’ambiance est particulière, survoltée. Nous habitons au rez-de-chaussée et ma mère fait la lessive au deuxième étage, où se situe la buanderie qui donne sur la terrasse. Je déteste les jours de lessive, ma mère n’arrête pas sa gymnastique : rez-de-chaussée, deuxième étage, deuxième étage, rez-de-chaussée.

Le linge chauffe dans la lessiveuse au rez-de-chaussée et ma mère le monte au deuxième étage le frotter, le rincer et l’étendre sur de grands fils à la terrasse. Le climat est électrique, car la fatigue est là.

Aujourd’hui, nous sommes à des années-lumière en pensant à nos machines à laver, dotées de boutons qui choisissent le cycle de lavage, la matière du linge et qui le sèchent aussi.

 

L’amorce du souvenir

Devant les tables encombrées d’objets et ustensiles anciens, le brocanteur me héla deux ou trois fois, et devant son insistance, je finis par m’arrêter devant son bric-à-brac.

Mes yeux parcoururent rapidement la surface et le monticule d’objets exposés, car mon intérêt était très limité. Puis peu à peu, mon regard se posa sur un pistolet métallique mais qui ressemblait fort à celui que ma grand-mère m’avait envoyé comme cadeau dans les années 60.

À l’époque, il s’agissait d’un pistolet « à bouchon », c’est-à-dire qu’il provoquait une petite explosion au moment du tir, il suffisait pour cela de mettre une amorce-bouchon dans le canon et un choc intérieur éclatait le projectile.

Je me saisis immédiatement de ce jouet. Le vendeur, surpris, me dit :

— Vous avez trouvé votre bonheur ?

Devant ma bouche bée :

— Oh oui, et même bien plus que ça !

Quelques minutes suffirent pour que je lui raconte les circonstances heureuses du cadeau de ma grand-mère. Il n’y avait pas foule devant le stand du vendeur et ainsi, il voulait bien m’écouter.

Devant ces révélations, somme toute banales, il me dit :

— Je vous fais ce souvenir pour dix euros.

Aussitôt ma réponse fusa :

— C’est tout ? Allez, je suis content, je vous en donne vingt !

Je lui tendis mon billet et récupéra aussi ce qui fut pour moi un petit trésor.

Cette surprise me réconcilia quelque peu pour ces balades qu’on appelle « foires à tout ».

 

Thierry la Fronde

Je découvris un jour, par hasard, dans une brocante d’un petit village, un objet que je n’avais jamais pensé revoir et qui me rappelait beaucoup de souvenir.

Une simple fourche en bois, aux deux extrémités des lanières découpées dans une vieille chambre à air de vélo, d’une vingtaine de centimètres, des élastiques reliés à un petit morceau de cuir carré, de cinq centimètres sur cinq, où là, on pouvait pincer un projectile, un caillou, un bonbon ou une bille.

La fronde, c’était un lance-projectile dangereux ; il fallait faire attention pour ne pas blesser personne, àa me permettait moi de me sentir plus fort, je pouvais faire envoler les oiseaux à distance sans les blesser, envoyer des cailloux loin dans la mare pour effrayer les canards et les oies.

Nous faisions surtout avec les copains des concours sur les boîtes de conserve ou éventuellement les petites bouteilles. Bref, le but était d’avoir toujours avec soi cet engin interdit, pour s’amuser entre nous.

Retrouver cette chose après tant d’années a réveillé en moi des souvenirs oubliés, enfouis dans ma mémoire.

Je fais quoi ? Je l’achète ou je ne fais que l’admirer, en pensant à plein de choses vécues à l’époque ?

Non, finalement, je préfère laisser la fronde sur l’étalage, j’en profite pour discuter avec la personne qui cherche à la vendre, lui n’avait pas connu ça et n’avait qu’une vague utilité de l’emploi.

 

La bouchonneuse de Papa

Le tire-bouchon a de multiples formes : le De-Gaulle qui écarte les bras quand la tige filetée entre dans le liège, la vis sans fin qui pénètre jusqu’à traverser le bouchon et même l’aiguille qui perce avant d’injecter l’air qui extirpe le bouchon. J’ai crois en un demi-siècle une flopée de tire-bouchons capables d’attirer les collectionneurs ou entrer dans un musée. Mais la pince à enfoncer le bouchon dans le goulot, je n’en ai connu qu’une seule : celle de Papa.

Chaque année, à la rentrée des classes, nos fins d’après-midi se passaient dans les vergers à ramasser les pommes, les mettre en sacs et aller au café du village acheter un « acquis » qui autorisait à ramener la récolte vers la maison. Que de souvenirs avec ce champ, ce bistrot et surtout cet « acquis », mot magique pour un papier effacé de ma mémoire.

Ensuite, nous attendions la presse qui venait écraser les pommes et verser le jus dans les tonneaux que nous poussions avec Papa dans la cave. Là se déroulait le miracle qui transformait le jus de pomme en cidre et en boisson. Un jour, Papa déclarait que l’heure était arrivée de mettre en bouteille. Aujourd’hui encore, la simple expression « mettre en bouteille » sonne comme une évidence : seul le cidre mérite cet honneur et les bouteilles de la cérémonie sont uniques, les vignerons mettent le vin en bouteille – je le concède – mais mettre en bouteille, sans autre précision, évoque le cidre en général et celui de Papa en particulier.

Branle-bas de combat : les flacons vides ont trempé toute la nuit dans l’eau froide où parfois une couche de glace s’est formée. Maman assure la mission de faire bouillir une marmite où nagent les bouchons de liège. Le film des souvenirs mélangent les images, le scénario est confus, l’ordre des séquences n’offre plus la fluidité des actions. Sortir les bouteilles propres de l’eau et les aligner dans la cave ; piper le nectar par le jeu des vases communicants ; passer la bouteille pleine à celui qui se brûle en sortant le bouchon du bouillon ; enfin, cerner, pincer et enfoncer le bouchon dans le goulot à l’aide de la bouchonneuse, aujourd’hui devant moi dans ce musée de la vie rurale.

Ainsi, mon enfance devient un moment historique, les colères paternelles parce que je traînais se transforment en faits mémorables et l’objet de mes souffrances enfantines est exhibé comme le témoin de temps révolus. Car j’ai souffert à cause de cette bouchonneuse : je devais en même temps serrer les deux bras pour comprimer le bouchon et le rendre plus étroit que le goulot, puis, sans attendre qu’il se détende, l’enfoncer en appuyant sur le levier. Mais trop souvent, l’effort dans un sens usait toute ma vigueur et me privait de la force nécessaire vers le bas. D’autres fois, le bouchon pleurait misère et refusait d’entrer là où je le destinais.

Je m’embrouille dans mes explications, alors que mon petit-fils regarde la mise en scène d’une cave d’autrefois dans le musée moderne :

— Dis, papy, la boule au-dessus du bouchon, tu la collais après ?

 

09 mai 2022

Produire une graine : 1000 caractères maximum incluant au moins 3 des 10 mots de l'opération "Dis-moi dix mots (d)étonnants" du Ministère de la Culture :

décalé - divulgâcher - ébaubi - époustouflant - farcer
kaï - médusé - pince-moi - saperlipopette - tintamarre

 

Matin de printemps

Quel beau soleil au réveil ce matin ; cela augure une belle journée. Un merle siffle, est-ce déjà le printemps ?

Les perce-neige sur les talus, les crocus sur les pelouses : époustouflant !

Des arbres déjà en fleurs, chaque année, le même renouveau.

Médusée, à l’hiver de ma vie, je reste ébaubie par la nature qui varie à chaque saison. Le printemps et l’automne me jettent dans un état décalé : je peine à l’automne, lorsque les feuilles tombent ; je rajeunis au printemps quand la nature reverdit.

 

Sacré Gauthier

Gauthier aime farcer, son côté pince-sans-rire en fait un jeune merveilleux. Son intelligence surprenante ne va pas jusqu’à me méduser mais ça pourrait, si je n’avais pas une vague idée de la réalité de la Méduse. Son humour décalé relance si bien les conversations qu’on se croirait dans les salons littéraires de jadis. Loin de lui l’idée de faire du « buzz » ou du tintamarre, mais kaï, combien de gens a-t-il ébaubis, laissés sur le cul par ses réparties vives et époustouflantes.

Saperlipopette, a-t-on envie de lui dire, si tes écrits sont le reflet de ton esprit, sans rien divulgâcher, tu es le roi des amuseurs. Rassure-toi, si j’aime tant ton humour décalé, c’est qu’il est si rare aujourd’hui qu’un jeune ait plus d’humour qu’un grand-père, qu’il vaut toutes les pépites d’un monde si enclin à raconter ses malheurs.

 

Intelligence héréditaire

Un garçon d’une dizaine d’années est premier de sa classe dans toutes les matières. Les uns le traitent de fayot, les autres disent qu’il est un génie. Sa malice et sa domination l’intriguent ; il se décide à demander à son père d’où il tient son intelligence. Le père médusé réfléchit, il ne s’était jamais questionné sur ce sujet :

— Kaï, songe-t-il avec désespoir, qu’est-ce que cette question époustouflante ? Saperlipopette, dois-je dire la vérité ou farcer le fiston ?

Le père cherche comment se glorifier aux yeux de sa progéniture. Enfin il se décide :

— Mon garçon, ton intelligence est héréditaire. Tu la tiens de tes parents. Pour être plus précis, elle te vient en ligne droite de ta mère, puisque la mienne, comme tu as pu le remarquer, est encore entière !

Je vous laisse imaginer le tintamarre quand madame ébaubie eut écho de la nouvelle.

 

La pierre levée

L’enfant regardait, médusé, cette pierre immense levée vers le ciel. Elle lui semblait décalée dans le paysage plat.

— À quoi elle sert ? D’où vient-elle ? se demande l’enfant.

— Du fond des âges, lui répondit sa mère. Elle en a vu passer des générations et des générations d’hommes, de femmes et d’enfants qui, comme toi, ont trouvé époustouflant qu’une telle géante résiste si longtemps aux années, aux intempéries et aux guerres.

 

Le pain du matin

Au cours d’un voyage à la Guadeloupe où nous avons fait la découverte de paysages époustouflants, nous avons fait la connaissance d’une résidente qui était caissière dans un supermarché où nous faisions nos courses.

Toujours prêt à farcer, je lui dis que chaque matin, j’étais obligé de me lever à cinq heures pour arrêter le boulanger dans sa tournée.

— Qu’à cela ne tienne, pince-moi et je lui prendrai votre pain et le déposerai sur votre table.

Médusé, je n’en revenais pas ! Nous pouvions déjeuner tranquillement sans nous déplacer. Les Guadeloupéens nous ont agréablement surpris.

 

Les bûcherons

Un jour d’été, Michel et Francis, deux bûcherons armés de leurs tronçonneuses, s’approchent de la forêt. Un grand cri d’oiseaux se fait entendre. Tout ébaubis, ils ralentissent. C’est simplement le geai, le gendarme de la forêt qui annonce leur arrivée.

 Saperlipopette, que se passe-t-il ?

Les branches des arbres s’étirent et s’entremêlent afin de former une clôture infranchissable.

— Pince-moi, dit Michel à Francis, je crois rêver. Approchons-nous quand même.

C’est alors que des vipères menaçantes sortent des talus. Impossible d’aller plus loin, il faut faire demi-tour. Les deux bûcherons repartent vers leur voiture sous le regard narquois des chouettes, qui les observent du haut des grands chênes.

La solidarité des êtres de la forêt protège leur lieu de vie.

 

25 avril 2022

Ce qui intrigua surtout les participants est la scène étrange et incompréhensible qu'ils découvrirent au milieu de la table où ils écrivent. Habituellement, le local est un exemple de rangement, que s'était-il passé ? Avait-on arrosé une victoire ou s'était-on consolé d'une défaite ? Les écrivains en herbe furent invités à dégainer leurs stylos et immortaliser ce qu'ils voyaient, ce qu'ils pensaient... ils sont partis dans toutes les directions.

 

Texte A

En entrant dans la salle cette après-midi, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir sur la table le téléphone décroché reposant sur une bouteille de liqueur de pêche, à côté d’une bouteille de calvados entamée, ainsi qu’une tasse renversée, posée sur le goulot, à côté du fil de la prise. Bizarre, bizarre, que s’est-il passé ?

 

Texte B

Ce que voient nos yeux (façon caméra).

Sur un coin de table, quatre objets sont posés. Une bouteille de calvados à moitié pleine et coiffée d’une tasse en plastique blanche. À côté se trouve un combiné téléphonique jaune crème, avec les initiales du CEPSNA. Il partage sa place avec une bouteille vide de crème de pêche des vignes de 50 centilitres, son degré alcoolique est de 17°C. Cette bouteille est posée dans sa partie inférieure sur le fil noir du téléphone, tandis que le goulot repose sur le combiné (espace pour décrocher).

 

Texte C

Sur une scène de crime, où un individu se trouvait juste avant les faits. Nous voyons un téléphone fixe débranché, le combiné recouvrant une bouteille de liqueur, inclinée et vide. À côté, une bouteille de calvados à demi-pleine, surmontée d’une tasse en plastique renversée. De là, que peut-on recueillir comme indices ?

Le poison était-il dans la bouteille vide, celle de calva contenant encore du liquide ou dans la tasse renversée ? Il faut relever les empreintes sur celle-ci et savoir si le téléphone avait fonctionné récemment.

De toute manière, cela nous permettra de savoir si le présumé coupable est passé par cette pièce, ou si c’est le propriétaire des lieux qui s’en est servi avant sa mort.

Suite au prochain numéro.

 

Une séparation

C’est le matin, Louis, installé devant la télé, boit son café. Il repense à la soirée d’hier. En compagnie de Claire, il avait fêté son anniversaire et avait bu pour cette occasion un kir au champagne, au sirop de pêche. Ils avaient même décroché le téléphone pour ne pas être dérangés. Que s’était-il passé ensuite ?

Leur amour semblait pourtant réciproque et très fort. Claire était partie en claquant la porte.

Louis regarde le téléphone, espérant un appel de sa part avec une explication. Il s’impatiente et arrose son café de calva. Leur couple semblait pourtant inséparable. Il est désespéré et boit plus que de raison. Si Claire s’en va, Louis ne verra plus Claire.

 

Texte E

La soirée s’achève. Pierre, Marie et les autres sont fatigués, épuisés par le débat « anti-alcool ».

— Oui, dit Pierre, pourquoi cette agressivité pour défendre nos idées ?

— Tout simplement, parce que l’alcool entraîne souvent des violences, répond Marie.

François écoute, conscient des effets souvent négatifs de l’alcool, mais il pense aussi aux moments de convivialité partagés avec des amis. Et tout en parlant, il s’amuse avec les objets posés devant lui. Il murmure :

— Le téléphone est là, oui, mais la personne qui a bu ne peut appeler, ne sait plus appeler.

Et pour le démontrer, il pose la bouteille vide, coincée entre le combiné et le socle. Il continue sa démonstration, il fait porter le chapeau à la bouteille de calva à moitié vide.

 

Texte F

Sur la table, un ancien téléphone filaire, le combiné posé en travers du cadran repose sur une bouteille vide étalée de tout son long : un flacon de sirop de pêche qu’on inclut dans les cocktails, même si aucune trace de mélange ne se remarque. Est-ce une scène de beuverie ? Un coup de fil en est-il la cause ou la suite ? Bien des questions se posent ; d’autant plus qu’une autre bouteille, de calvados celle-là et seulement entamée, est posée en arrière de l’appareil. La timbale emmanchée sur le goulot laisse penser qu’elle a servi.

 

Texte G

Quel carnage ! En me levant ce matin, je me suis demandé ce qui s’était passé, je n’ai pourtant pas entendu de bruit.

Ces fêtards ont bloqué le téléphone avec une bouteille d’alcool, vide bien évidemment, pour ne pas être dérangés. Combien étaient-ils ? Mystère !

Une bouteille de calva vide, un seul gobelet, ils ont dû tout boire dans le même. Dans ces soirées, on n’a que faire de la pandémie ; l’alcool tue les microbes, et la notion de maladie transmissible est inexistante.

Comment ont-ils fini cette soirée ? Pas trop mal, je pense !

 

11 avril 2022

Chaque auteur a imaginé une scène avec trois interlocuteurs discutant de l'atelier d'écriture : un participant ; un détracteur sans savoir de quoi il parle et le dernier qui découvre cette activité.

 

Jean, André, Claude se retrouvent au Café de la place, comme tous les mardis. Ils parlent du quotidien, de leurs activités. Aujourd’hui, Jean aborde le sujet qui lui tient à cœur, son atelier d’écriture, il décrit les séances avec enthousiasme, il aimerait sans doute inviter Claude et André à adhérer.

Claude refuse de poursuivre leur conversation sur ce sujet.

— Atelier d’écriture, dit-il. Écrire quoi ? Écrire pourquoi ? Moi, je préfère lire, regarder la télévision, échanger avec les amis, me promener. Non, vraiment cela ne m’intéresse pas et je ne comprends pas ton enthousiasme.

Jean explique et décrit le plaisir qu’il ressent pendant les séances d’atelier d’écriture.

— J’apprends à donner une vie aux mots, je développe ma curiosité, je joue avec mon imagination.

André boit son café, il n’écoute pas, son esprit vagabonde loin, il rêve. Il ne comprend pas les échanges passionnés de ses amis, l’écriture est un domaine inconnu, lointain ; il pense aux difficultés rencontrées à l’école. Le maître usait de patience, mais André rêvait de montagnes, d’animaux en liberté et l’écriture l’ennuyait.

 

Écrire ? Laissez-moi rire !

Jean était très fier de lui. En début d’année, il s’était inscrit à un atelier d’écriture et ça lui plaisait beaucoup. Lors d’une réunion avec les copains, Jean décida de leur en parler.

— Vous ne savez pas, les gars, je me suis inscrit à un atelier d’écriture.

— Ah bon, répondit Pierre, c’est quoi ça ?

— Tu ne connais pas, fit Yvan.

— Bien non !

— C’est pour les snobs qui croient qu’ils savent écrire. Ils se prennent tous pour des écrivains comme Chateaubriand, Flaubert et compagnie.

— Ah bon, s’exclama Pierre.

— Mais pas du tout, répondit Jean, ce sont des gens qui s’intéressent à la lecture, à l’écriture et qui éprouvent l’envie de s’améliorer.

— Peut-être, répliqua Yvan, mais tu ne m’ôteras pas l’idée que c’est quand même des gens qui se croient plus intelligents que les autres.

— Pourtant, dit Pierre, ça a l’air pas mal, j’aimerais bien, moi, savoir écrire des histoires.

— Bien, viens avec moi à la prochaine séance, fit Jean. Tu verras

— D’accord, répondit Pierre.

— Eh bien, maintenant en voilà deux qui vont se prendre pour des champions de l’écriture. Vous les sortez quand, vos premiers livres ? Faites pas cette tête, je rigole !

 

Points de vue houleux

À la chorale, une conversation s’engage sur l’atelier d’écriture dont je fais partie.

Geneviève, l’éternelle contestataire, s’exprime et ironise sur notre savoir-faire. Lise-Marie nargue Geneviève, ces deux-là heureuses de se chipoter, se lâchent sur le sujet.

Je tergiverse, je soupire et leur fait entendre qu’il est agréable de déblatérer sur des sujets sans dramatiser et discuter ensuite de ses écrits. Lise-Marie pas très enthousiaste grommelle :

— Il y a mieux à faire que de baragouiner à vos âges !

Geneviève, très sûre d’elle, dit, assez méprisante, que cet exercice puéril ne lui serait d’aucun intérêt.

Je me tais, sinon je vais leur aboyer dessus.

 

Envie d’écrire ?

William rentrait chez lui, un dossier à la main, la capuche du blouson sur la tête pour se protéger de la pluie.

— Eh, William ! C’est moi ! Tu ne m’as même pas vu avec cette capuche sur le front, s’exclame José.

— Ah, mes amis, bonjour José, bonjour Sylviane, bien content de vous voir, se réjouit-il.

— Mais d’où reviens-tu ? questionne José.

— De l’atelier d’écriture, répond William ; je voulais justement vous en parler ; entrons boire un café dans ce petit bar.

Les voilà installés à l’abri de la pluie.

— Qu’est-ce que c’est, un atelier d’écriture ? questionne Sylviane, tu fais des dictées ? Tu recopies des textes ?

— Tu as envie de retourner à l’école, se moque José.

— Pas du tout, réplique William ; c’est très intéressant. Un animateur te donne des idées, des consignes et des conseils ; ensuite tu écris un texte.

— Ça me plairait bien, fit Sylviane, d’un air enjoué.

— Inutile, rétorque José, je n’ai pas besoin de ça pour écrire. Tu te souviens, Sylviane, des poèmes que je t’écrivais quand j’étais à l’armée…

— Justement, argumente William, pour la Saint-Valentin, l’animateur nous a demandé d’écrire un poème d’amour. Ça t’aurait convenu.

— Mais je n’ai pas envie de raconter ma vie personnelle, protesta José.

— On ne te demandera pas de le faire, rétorqua William.

— Est-ce que l’ambiance est sympa ? questionna Sylviane.

— Super sympa ! répondit-il, essayez de venir, ne serait-ce qu’une fois ; ensuite, vous ne pourrez plus vous en passer.

— Oh, bougonna José, mais c’est pour faire plaisir à Sylviane. Après, on verra…

— Je suis sûr que ça vous conviendra à tous les deux. À lundi, alors.

 

Pourquoi pas ?

— Tiens, dis donc, je voulais te dire : je fais partie d’un atelier d’écriture depuis peu. Ça pourrait peut-être t’intéresser.

— Pas du tout, ça ne m’intéresse pas. Je suis contre l’école, la hiérarchie et tout le saint frusquin…

— Ah bon, je ne te connaissais pas sous cet angle : eh bien, écoute qu’à cela ne tienne, je trouverai bien quelqu’un d’autre !

— Eh bien moi, s’écria Jules ; ça pourrait éventuellement m’intéresser. Je suis de nature curieuse, même si je n’ai pas l’âme d’un écrivain.

— Écoutez, les amis, y a pas besoin d’être sortie de Sciences Po. Moi, je peux vous dire que je m’y intéresse de plus,; alors que je n’étais pas partant au départ. Et toi, Jules, qu’est-ce que tu en penses ?

— Et pourquoi pas ? Et ça se passe à Dieppe, sans doute ?

— À Saint-Nicolas. Encore mieux.

— Je connais tout le monde et rien que de savoir pour qui la majorité a voté, je n’irai jamais.

— Mais comment ça se passe ? demande Jules.

— Très bien, notre coach, ou conseiller si tu préfères, est sympa. Comme disait ma grand-mère : il boirait bien un cop avec un ouvrier, d’autant plus que ce n’est pas lui qui paie – non – il est très sérieux, il est même allé faire écrire des condamnés dans les prisons. Faut le faire…

— Ah oui, il a peut-être été condamné lui-même !

— Bon, Jules, finalement : ça t’intéresse ou pas ?

— Oui, finalement, tu n’as qu’à m’inscrire, j’essaierai de me montrer moins bête que je n’ai l’air.

— Pour moi, pas question : inutile d’essayer de me convaincre, je reste sur mes positions.

 

Jalousies de gribouillaux

Annonçant à des amis que j’étais adhérent à l’atelier d’écriture du CEPSNA, Jean me promit de venir voir au moins une fois de quoi il retournait.

Brigitte quant à elle refusa tout contact ace ce type d’atelier, malgré les efforts que je fis pour les persuader.

— Ah, me dit-elle, j’écris déjà, je corrige même Jean, alors c’est pas pour moi ! J’ai peur d’en savoir plus que ton prof.

Jean, malgré sa promesse, ne vint pas. Brigitte l’avait dissuadé.

— Tu comprends, dit-elle, nous avons eu du mal à trouver un style et on risque de nous ficher tout par terre. Comment s’intégrer dans un groupe, alors que nous sommes en binôme.

— Il a bien insisté que polir sa prose au contact des autres ne pouvait être que bénéfique !

— Rien à faire ! C’est niet !

Elle en avait lu, de ces gribouillis : ça la faisait rire. Jean, interloqué, aurait bien voulu être confronté à un véritable atelier d’écriture, qui, sans se prendre au sérieux, permettrait de progresser dans les différentes façons de transcrire ce qu’on imagine ou ce qu’on pense.

— Tu ne trouves pas que, dans la transcription de dialogues, on a des progrès à faire ?

Pour Brigitte, ce n’était pas le problème :

— On peut toujours faire du dialogue indirect.

Il l’aimait bien, ça ne lui plaisait pas de la voir si butée.

Jean s’imagina un instant qu’il lui échapperait et qu’ainsi elle perdrait ses prérogatives de correctrice. Il y avait peut-être bien de cela après tout ? Il n’insista pas, il ne voulait pas jeter de grain de sable dans ce couple littéraire qui s’entendait si bien.

 

C’est quoi ça ?

Albert attend ses copains sur le banc du parc Bayard, le rendez-vous des amis au retour des courses.

— Tiens, te voilà, lance-t-il à Gérard.

— Salut, c’est la forme ? réplique l’acheteur du journal.

— Quoi de neuf aujourd’hui ? demande Albert en désignant le quotidien qui dépasse du cabas.

— Rien de particulier. Ils parlent du CEPSNA qui rouvre son atelier d’écriture le 6 septembre.

— Son quoi ? s’étonne Albert.

Gérard hésite un instant, il ne sait pas trop quoi dire à propos de l’activité, il en a vaguement entendu parler, mais n’en a compris que des bribes disparates.

— Un truc où ils se prennent la tête, maugrée-t-il. Des gens qui se plaisent à se torturer les méninges.

— Quelle idée, s’exclame Albert. Pourquoi ils appellent ça de l’écriture ?

— Ah, s’écrie Jules qui pointe le bout de son nez. Tu veux te mettre à l’écriture ?

— Non, rigole le questionné, c’est Gérard qui me raconte ce qu’il a lu dans le journal.

— Et qu’est-ce que tu lui as dit, ironise le nouveau venu en s’adressant à l’informateur.

— Il chantait qu’au CEPSNA, ils se torturent avec l’écriture, résume le copain intrigué.

— Pas vrai, s’insurge Gérard qui n’aime pas entendre ses propos déformés, tu racontes n’importe quoi. Dans le journal, ils parlent de l’atelier d’écriture, une connerie pour les gamins, un truc pour s’amuser avec les fautes d’orthographe ou les règles de grammaire, une espèce de Mot le plus long ou Questions pour un champion… J’irai jamais y mettre les pieds.

— En voilà des nouvelles, se moque Jules. Et tu tiens ça de qui ?

— C’est connu ! tempête l’informateur.

— Je vais te donner une autre version, celle de quelqu’un qui y met les pieds, comme tu dis.

— Albert écarquille les oreilles, il s’étonne d’avoir des copains si différents : l’un qui affirme ses idées sans les avoir vérifiées et l’autre qui participe à une activité dont lui-même n’a jamais entendu parler.

— On se retrouve de temps en temps, explique l’écrivain en herbe. Simplement avec un papier et un crayon. L’animateur, Jacques Petit…

— Ah, coupe Gérard un tantinet vexé, le fils du notaire.

— Non, continue Jules, son neveu. Le fils à Georges…

Le débat vrille autour des généalogies incertaines avant que Jules complète son exposé. Il détaille les moments de l’atelier, en s’enthousiasmant avec véhémence. Gérard tente quelques fois de vitupérer sur ce genre de loisirs, insensé à ses yeux, tandis qu’Albert pense avoir saisi ce dont il s’agit.

— C’est pas tout, y a la soupe qui attend, argue le détracteur de l’atelier d’écriture.

— Nourrir le corps avant l’esprit, tempère le participant en levant le doigt au ciel.

— Allez à demain, les gars, salue Albert en s’extirpant du banc.

 

28 mars 2022

Utiliser cinq expressions liées à la nature (soulignées) et de fixer le récit au printemps.

 

L’apprenti jardinier

Ce jour-là était à marquer d’une pierre blanche ; pour la première fois, mon père m’autorisait à l’aider au jardin. Plutôt que rester planté comme un poireau, j’avais enfin le droit d’attraper un outil et participer aux gros travaux !

Je n’avais que quatre ans : fin comme un haricot et haut comme trois pommes, le moindre manche était deux fois plus grand que moi. J’agrippai un râteau et me postai à côté de mon père ; il avait à peine semé une graine que je comblais le sillon d’un coup plus ou moins adroit. Les cris paternels ne me jetaient pas des fleurs ; bien au contraire, ils disaient que je lui courais sur le haricot et que j’avais un pois chiche dans la tête. Je me sentis rougir comme une pivoine, j’en avais gros sur la patate.

Cette malheureuse expérience aurait pu nuire à ma vocation de jardinier en herbes. Par chance, mon père avait autant d’amour que de patience, et j’en ai pris de la graine : sans en faire des choux gras, mon lopin de terre garnit toujours mon garde-manger.

 

Histoire à l’eau de rose

Nicolas a la pêche ce matin. C’est le printemps, il chante, il doit retrouver Marie, il ferme les yeux, il pense à elle, elle est belle, elle a les yeux en amande.

— Et moi, se dit-il, ce n’est pas pour me jeter des fleurs, mais je suis pas mal. Seulement je suis fauché comme les blés, donc pas de rencontre au restaurant, pas de film non plus, c’est une histoire à l’eau de rose. Alors, je vais lui proposer une promenade en forêt. Marie est si timide qu’elle sera rouge comme une pivoine, mais tout compte fait, ça ne me coûtera pas un radis !

 

Printemps au jardin

Rose se languissait de voir arriver le printemps, car les provisions faites l’année précédente étaient bien entamées ; il était temps de se refaire un peu la cerise.

Au jardin, les mauvaises herbes poussaient comme du chiendent, il devenait donc urgent de semer et de planter. À 70 ans, elle avait encore la pêche, il suffisait seulement de se sortir le cul des ronces et en avant.

Et je te plante les poireaux, les petits pois et les carottes. Attention quand même que toute cette agitation ne la fasse pas tomber dans les pommes. Tout en s’activant, Rose lorgnait sur son voisin qui, même s’il avait un pois chiche dans la tête, se donnait à fond et s’employait à biner et semer. Son jardin, il y tenait comme à la prunelle de ses yeux.

Alors chaque printemps, la compétition battait son plein entre les deux jardiniers. Mais tous les ans, ça se terminait bien et chacun se jetait des fleurs.

 

Tout ça pour des prunes

Tous les cinq ans, se déroule en France l’élection présidentielle ; celle-ci se tient au printemps.

Chaque candidat présente un programme qui, vu ses prétentions, ses promesses, sent le fagot ! Celui-là va faire faire des fleurs à tout le monde ; celui-ci a l’air d’avoir la banane, mais cette énergie dépensée à grands coups de slogans me court sur le haricot ! Les médias reprennent les discours maintes fois entendus, maintes fois répétés, avec chaque candidat qui à chaque intervention ramène sa fraise.

La campagne passée, le catalogue du Père Noël distribué, et le résultat arrive comme je le prévoyais : mon poulain a perdu, il est arrivé troisième, tous ces efforts pour des prunes.

Quant au vainqueur, il a ratissé large, ménageant la chèvre et le chou.

 

Le Festival des plantes

La feuille de chou nous annonce dimanche le Festival des plantes nouvelles. Quelle splendeur, chaque année dans le parc, que cette exposition qui se déroule toujours au printemps !

Il y en a pour tous les goûts ; il ne faut pas en revanche être fauché comme les blés. C’est très attractif, très varié. Cela va des fleurs à toutes sortes de réalisations artistiques, en fer forgé à la tête aux oreilles en feuilles de chou, des mobiles, etc.

Dans les allées, des bouts de choux vont, courent de stand en stand, agrippent les parents qui vont être marrons dans cette affaire. Des travaux de couture, des objets en laine, coquelicots et autres fleurs, des produits fermiers sont également exposés, du cru. La cerise sur le gâteau : on peut goûter ! Alors là, les carottes sont cuites, on se laisse aller aux achats, on demande de couper la poire en deux, et on repart heureux, nous en avons pris plein les yeux, mais qui est le cornichon dans l’histoire ?

 

Le lapin farceur

Un matin de fin mars, Françoise me filait un rencard ; j’étais aux anges.

Une heure avant le rendez-vous, je faisais le poireau comme Jo Dassin avec son petit bouquet d’églantines. J’attendis jusqu’à l’heure dite : chou blanc, pas plus de François que de requin dans la Tamise ! Je me demandai si elle ne m’avait pas pris pour une prune et si je devais lui rentrer dans le chou. J’étais le cornichon de cette histoire.

Rongeant mon frein, je patientais encore un peu quand, soudain, mon eau de boudin se transforma en eau de rose : Françoise apparut, les yeux en amande, se fendant la poire et rouge comme une tomate :

— Désolée, me dit-elle, j’avais pas prévu le décalage avec l’heure d’été. Et cerise sur le gâteau, ma bagnole est tombée dans les pommes !

 

14 mars 2022

Après avoir listé 3 rêves d'enfant, 3 défauts personnels et 3 moyens magiques de se sortir d'un mauvais pas, les participants étaient invités à rédiger un texte (souvenir, imagination ou autre) où le personnage central cherchait à réaliser un rêve d'enfant, était contrarié par son défaut et sauvé par magie. Enfin, les auteurs étaient appelés à titrer leur récit.

 

Rêves de toujours

Être chef d'orchestre : un rêve d'enfant. D'un milieu modeste, j'écoutais la radio, je me voyais devant tous ces instrumentistes avec ma baguette. Chanter était aussi un rêve, mais à part la Marseillaise le jour des prix à l'école... Mon instrument préféré était l'accordéon, mais pas de moyens pour les cours et l'achat de l'instrument. Le solfège m'aurait bien aidé, avec mon aversion pour les chiffres, cela devient difficile, les croches, les noires, les blanches, trop compliqué.

J'ai déjà pas mal voyagé, il serait temps, mais la France est tellement belle que d'un coup de baguette magique, j'aimerais me réveiller à un endroit et parcourir la France profonde, inconnue. Visiter, en un mot, implique déjà d'être plus jeune, en pleine forme, avoir les moyens financiers.

Je suis admirative des gens qui laissent tout, partent à l'aventure et découvrent plein d'univers. Tout cela est dû à tout le monde ; il faut simplement adopter un autre mode de vie, mais c'est l'âge aussi qui fait voir d'autres horizons.

Trop tard, tout ceci ne reste qu'un rêve.

 

Rêve d’adolescente.

 Nous sommes le 14 mars 2022 , le ciel est bleu, le soleil rayonne, et les rêves m’envahissent..

J’ai 16 ans, je regarde un avion voler tout là haut.

Être hôtesse de l’air, oui, mon imagination s’envole, je ne pense pas aux études, aux contraintes, je vois du pays, je côtoie chaque jour des gens différents..

Mais le doute est très fort, et calme mon enthousiasme, la peur est là, peur de ne pas y arriver, de ne pas savoir. L’angoisse m’étreint.

L’avion est passé laissant une longue traînée blanche.. J’ai envie de m’accrocher à ce nuage et d’y trouver la force de réaliser mon rêve.

Tu apprendras plusieurs langues, tu sauras surmonter ton angoisse, me suis-je dit.

 

Le gendarme de l'île de la tortue

Pour tout vous dire, j'avais toujours rêvé d'être gendarme quand j'étais enfant pour protéger ma maman qui m'avait élevé seule. À telle enseigne que j'en avais parlé à ma maîtresse d'école, et comme en fin d'année, nous faisions des rôles sur scène, elle m'avait donné ce rôle : "Un jour, je serai gendarme".

Mais là, ce n'était qu'un rêve. Dans la réalité de la vie, mon caractère fait que je veux toujours avoir raison, et bien sûr dans ce métier, il faut savoir exécuter des ordres, être discipliné. Malheureusement pour ce genre de métier, c'est important et primordial.

Alors heureusement un jour, je me suis retrouvé sur une île déserte, seul habitant. Alors là, j'ai pu réaliser mon rêve : être un gendarme et pour cause, j'étais seul, sans personne à l'horizon. Je pouvais me commander moi-même, faire ce que j'avais envie en ayant l'impression d'accomplir une mission. Par exemple, siffler après les oiseaux, dresser un PV à une tortue ou regarder un serpent dans mes jumelles.

 

Touché par la grâce

Vers l'âge où l'on fait du vélo, je rêvais déjà de monter et de piloter une moto, si possible de grosse cylindrée... pour aller plus vite que le vélo, bien sûr, mais surtout pour les sensations que je devinais déjà : l'approche des virages, le freinage au dernier instant, avant de se coucher du côté de la courbe et d'accélérer aussitôt... que de paysages imaginaires j'ai traversés.

En grandissant, j'ai pu obtenir, à peu près, ce que je voulais : avoir une moto. J'avais et j'ai encore le défaut de manquer de sagesse et de "monter trop vite dans les tours" (de la vie cette fois !)

À chaque sortie et à chaque fois qu'une voiture me dépassait, je la suivais et sans faiblesse, malgré les kilomètres, je la dépassais enfin !

Sauf une seule fois : il faisait nuit, il pleuvait, une voiture de sport me dépassait promptement et je ne pus, à cause de la fatigue, la suivre.

Heureusement, un moyen magique vola à mon secours, il me donna beaucoup de force, de ténacité et surtout, il me fit complètement oublier la fatigue. Ainsi, je redoublai de vigilance, suivi les feux de cette satanée voiture qui m'avait dépassé plusieurs kilomètres avant, et enfin, malgré le vent, la pluie, j'effectuai le dépassement rêvé depuis longtemps et ceci sans appréhension !

 

Fin de règne

La reine Hachepsout était songeuse, le matin même elle avait vu le grand prêtre parler avec son beau-fils, le prince Toutmosia. Ceux-ci avaient des airs de conspirateurs. Elle savait que ses jours à la tête du royaume étaient comptés.

Toutmosia allait avoir dix-huit ans et donc l'âge d'être pharaon et de régner.

Pourtant elle n'était pas prête à lui laisser le trône d'Égypte, car grâce à elle, son entêtement et sa ténacité, le pays était enfin en paix avec les pays voisins.

Non seulement l'empire était en pais, mais il était riche et ses habitants bénéficiaient tous de cette tranquillité, les salaires avaient augmenté, les prix alimentaires stables. Elle pouvait être fière du travail accompli.

Le prochain règne serait-il aussi tranquille ?

 

Du tac au tac

Gilou n'a qu'une idée en tête : faire le tour du monde comme les animateurs qu'il voit à la télé dans "Les trains pas comme les autres" ou "J'irai dormir chez vous". Sa mère tente de la ramener sur terre :

- Pour cela, tu dois travailler à l'école et apprendre les langues étrangères. L'anglais, l'espagnol et le chinois te seront d'un grand secours.

- OK, réplique Gilou, sûr et certain de ce qu'il affirme. On verra ce qu'on verra !

Les leçons données en cours particuliers constituent ce qui s'appelle une galère : il mélange les mots, il confond les règles de grammaire et ne parlons pas des jours de cours qu'il inverse.

- C'est pas de ma faute, ils ont qu'à parler en français, comme moi.

Plus il avance dans son apprentissage, plus il envoie paître ses professeurs et leurs manies de lui inculquer les langages.

Pour ses vingt ans, Gilou demande deux cadeaux originaux : un passeport et un vélo pour parcourir les cinq continents. Sa mère mélange la joie de voir son fils heureux et l'angoisse de le voir partir de la maison :

- Comment va-t-il s'en sortir, implore-t-elle : lui qui ne sait parler aucune langue, ni coudre un bouton, pas même cuire un œuf ?

Par chance, Gilou a un pouvoir secret : dès que quelqu'un lui fait une observation, il lance une répartie si drôle que l'interlocuteur s'amuse et le remercie en lui donnant satisfaction. La fantaisie fonctionne en français, elle montre son efficacité en arabe, en langue mimée, en dessins tracés à grands traits. Avec ce moyen merveilleux, Gille traverse l'Afrique, sillonne l'Amérique, navigue en Océanie, parcourt l'Asie et l'Europe.

Quand il revient à la maison, sa mère ne le reconnaît pas : son fiston sait dire "bonjour" et "merci" en quarante-deux langue ; qui plus est : sans les confondre.

 

Vous avez dit : Atelier

Je voulais que ma grand-mère Gabrielle me garde chez elle au lieu de m'envoyer à l'école maternelle. Deux séjours devant le tableau noir m'avaient décidé à faire de la résistance, d'autant que mes genoux s'en rappelèrent longtemps.

Après deux demi-tours sur la route de l'école et une coqueluche bien longue, j'obtins satisfaction. L'apprentissage de la lecture devint un véritable plaisir sous le tic-tac jamais pris en défaut de l'horloge comtoise. Elle avait deviné sans doute ma patiente obstination quand il s'agissait de réaliser mes rêves d'aventure, qui pouvaient se limiter à l'escalade des pommiers dans la cour.

Les mots devinrent en ce temps-là un régal dont je ne suis pas encore lassé, puisque lorsque je visite une ville, je ne peux m'abstenir de faire le tour des librairies, des bibliothèques et autres médiathèques. Ma présence à cet atelier d'écriture pourrait constituer le véritable point d'orgue de mon aventure terrestre.

 

Tout là-haut

Je courais, je courais, je courais de plus en plus vite sur le goudron de la cour et je levai les bras espérant qu'ils se transformeraient en ailes.

J'aurais voulu voler comme un oiseau, mais réalisant que c'était impossible, j'avais pris la décision de devenir pilote d'avion à l'âge adulte.

Mais les avions sont rangés dans des hangars. Ça pose problème, car dans les hangars, il y a des araignées.

J'ai une peur bleue de ces bêtes noires et velues qui parviennent toujours à se faufiler. Je suis sûre qu'elles arrivent même à grimper dans les avions.

J'ai trouvé une double solution à ce problème : il suffit de posséder un balai de sorcière capable à lui seul de chasser les araignées, puisqu'il est balai, et de me faire voler puisqu'il est balai de sorcière.

 

28 février 2022

Micro-nouvelle libre

 

Texte A

Mais où est passée Marie-Josèphe ?

En ce temps-là, le petit théâtre de Dieppe, de la place Camille Saint-Saëns, complétait son programme par des séances de cinéma. Al y avait vu La mort aux trousses et Qui a tué Harry, mais quand il s'agit de trouver Marie-Josèphe Guillemette, les gens du coin séchèrent, tout comme la police d'ailleurs. Certains l'avaient vue s'engager dans les tourelles ; d'autres affirmèrent qu'elle avait pris l'habitude de marcher dans l'eau, à marée basse, sur le sable, les chaussures à la main. la faculté lui avait indiqué ce remède.

Mais alors pourquoi, à la nuit tombée, n'était-elle toujours pas rentrée ? Sa voisine de palier avait donné du lait au chat qui miaulait devant sa porte. Se serait-elle approchée de la falaise si fragile après l'hiver ? Ne commençait-elle pas à perdre un peu la boule ?

L'histoire se termina bien, la patronne de l'Huitrière de Pourville avait retrouvé une personne désemparée devant son établissement. Les pompiers la ramenèrent chez elle. Hitchcock et ses suspens n'étaient pas à la manœuvre, hélas !

 

Texte B

Marie était pensive, ce matin, en tout cas plus que les autres jours. Devant sa tasse de thé, lorgnant la pendule qui déjà affichait sept heures ; les obligations de cette jeune mère défilaient dans sa tête : les enfants vont bientôt se lever, leur déjeuner sera prête, ils monteront dans la voiture où ils se disputeront sans doute un peu ; de retour, la maison sera à ordonner, les lits à faire, le linge à étendre, puis se préparer pour le travail. Et encore une journée répétitive, sans éclat !

Marie pensait aux seuls jours où son esprit s'égayerait et ses mains s'essayeraient à la peinture de sa nouvelle toile. Puis ce serait des courses à pleins poumons dans la forêt qu'elle connaît si bien.

- Essayons, se dit-elle, de garder mon esprit ouvert sur ce monde.

 

Texte C

Jean et Marie habitent un petit village ; ils ont pour voisine une famille de deux enfants : le papa est ouvrier et la maman  employée. Pour survivre, ils élèvent des poules et profitent des œufs... mais le problème : il faut les nourrir.

Jean a une idée ; il dit à Marie :

- Si nous faisions une surprise aux voisins !

C'était juste à la fin de l'hiver. Il fabriqua des pieds de maïs avec des graines qu'il avait conservées de l'année précédente. Le soir, à la tombée de la nuit, il planta les tiges pour former un petit champ.

Le lendemain, ils attendirent le réveil des voisins pour voir leur surprise ; mais là : catastrophe. Un renard était passé dans la nuit et avait embarqué toutes les poules. Jean avait oublié de fermer la porte du poulailler !

Moralité : si vous avez des poules, enfermez-les.

 

Texte D

Sylvie n'aimait pas l'école. Elle était bien trop jeune à son entrée au CP, elle avait envie de jouer plutôt que de rester assise sur un banc. Ses pieds ne touchaient pas par terre, une vraie torture pour ses petites jambes. Heureusement, il y avait les récréations, elle jouait à la balle sur le mur :

Arthur,

Qu'est-c' qu'est dur ?

C'est le mur !

Un peu plus haut,

J'casse un carreau.

Un peu plus bas

Je tue mon chat.

Pauvre p'tit chat.

Le coup de sifflet final ! Au lieu d'aller se ranger, Sylvie courait se cacher dans un coin du préau. Mais, la "bonne" copine, la meilleure de la classe, la fayotte levait le doigt : "Moi, je sais où elle est !" C'était fichu.

Non, vraiment, elle n'aimait pas l'école. Pourtant, quinze ans plus tard, Sylvie commença une carrière d'institutrice, avec pour mission de faire aimer l'école aux enfants.

 

Texte E

- Ouf ! le travail est fini, se dit Mary. Mais, comme tous les jours, il y avait encore le métro à prendre, quelques courses à faire et elle pourrait enfin s'installer dans le canapé et se reposer.

Elle prit le métro à la station Motte-Piquet-Grenelle, évidemment, comme tous les jours à cette heure-là, il était bondé et c'était debout qu'elle s'apprêta à faire le trajet jusqu'à son domicile ; la promiscuité lui était toujours aussi difficile. Il lui sembla sentir une pression au niveau de son sac à main. Elle le serra un peu plus contre elle.

Arrivée à destination, Mary entra dans sa petite épicerie préférée, prit quelques courses et fila vers la caisse. Mais voilà, son porte-monnaie avait disparu.

- Oh, non ! s'écria-t-elle. Hélas, quoi faire ? porter plainte ?

Elle n'avait aucune idée de celui qui l'avait volé. Il ne restait qu'à passer ce larcin en pertes et profits, plutôt en pertes d'ailleurs ! Sale journée

 

14 février 2022

À l'occasion de la Saint-Valentin, l'atelier parle du sujet le plus vibrant.
Entre gens de lettres, nous privilégions la forme poétique, quelle qu'en soit la forme : libre, rimée, en alexandrins ou en prose.

 

Texte A

Je me sentais si seul

Ton amour m’a conquis

Et sorti du linceul

Ton sourire joli

M’a transformé heureux

Oubliant mes soupirs

Tu as charmé mes yeux

À jamais satisfaits

D’entendre tes sourires

Et sentir tes baisers

 

J’étais trop sérieux

Tentant à briller trop

Avant toi tous mes jeux

Sonnaient en plaisirs faux

Je n’étais qu’un enfant

Obligé à grandir

Devenu ton amant

Le monde s’éclaira

Avide de plaisirs

Serré entre tes bras

 

Texte B

Bonjour Valentine

Bonjour

Valentin piétine

Sais-tu quel jour nous sommes ?

Silence

Valentine est là, mais si loin dans ses pensées.

Nous sommes samedi 14 février.

Valentin est triste, les souvenirs sont là, vifs, prenants.

Il y a si longtemps pourtant.

Valentin et Valentine sont jeunes et heureux de vivre ce moment formidable, le jour de la Saint-Valentin.

Ils disent oui à leur avenir.

Ils rêvent. Travail, maison, enfants, voyages. Le fil se déroule. Ils s’aiment, la vie est là.

Aujourd’hui, les souvenirs sont là.

Valentin se secoue.

Il voudrait tant retrouver le goût des beaux jours.

 

Texte C

L’amour dure sept ans

Comme dit l’écrivain

Mais pour toi seulement

Le mien sera sans fin.

 

Pour toi et seulement nous

Nous, les autres ne verront

Pas notre maison d’amour

Dans ce monde de béton.

 

Loin des champs de fleurs

Roses et bleues comme ta peau

Projetant une belle couleur

Garnie de paillettes et d’eau

 

La nuit la plus noire

Avec ses cauchemars mordants

Ne pourra rien sur notre espoir

Qui se conjugue avec AMANTS.

 

Texte D

Je veux t’aimer jusqu’à n’en plus dormir

et quand vient le sommeil, enfin rêver et attendre demain,

craindre que cet amour ne soit plus de la même intensité,

se réveiller et trembler, peur de ne plus ressentir ces sentiments si puissants la veille.

La nuit peut apporter l’audace, la méfiance, le doute, la timidité, l’estime de soi, de l’autre.

Enfin se réveiller et aimer, se sentir aimée, ne plus craindre.

Et ne cesser d’aimer.

 

Texte E

Mon prince charmant

Rêve d’adolescence

Attendant ta présence

Et pourtant…

 

Si dans mes rêves bleus

Je ne voyais pas de mobylette bleue,

Tu la chevauchais, un beau jour

Cherchant peut-être aussi l’amour.

 

Tu étais un enfant des bois

J’y suis allée une fois

Une branche de sapin

Tu m’offris

Pour la Saint-Valentin

Et je t’ai souri.

 

Je bénis ce jour

Où je découvris un amour

Qui dure toujours.

 

Texte F

Rossignol, rossignol de mes amours

Quand ton chant s’élèvera

Ton envie reviendra,

Le chagrin disparaîtra,

Le désir sera sublime.

Tout en haut de la cime

Tu pourras m’apercevoir

Je te ferai signe

Comme tu l’imagines.

 

Texte G

Dites-moi, se plaint-on de se sentir aimer ?

Oui sans doute quand on ne sait le retourner.

Alors se plaint-on de ne pas aimer ?

Sans doute tant qu’on ne sait ce que c’est.

Mais alors se plaint-on donc, dites-moi

De n’avoir appris quoi que ce soit

Sur la conjugaison simplissime du verbe aimer,

Et enfin une fois pour toutes

Dites-moi que doit-on faire pour ne pas pleurer

Quand cette belle émotion tourne en déroute.

 

Texte H

Comme je t’aime

De ton âme

Mon être s’enflamme

Mon sang bout

Dans mes veines debout

J’ai la tête qui tourne

Mon cœur léger « bourdonne »

Je te prouverai mon amour,

Avec des baisers en retour,

Merveilleux ce sentiment

De pouvoir aimer énormément

Sans penser autrement

À l’avenir seulement.

 

Texte I

Mon bel amour te souviens-tu de nos beaux jours ?

Est-ce pour toi un souvenir joyeux ou douloureux.

Voudrais-tu les revivre ou les oublier ?

Qu’ils étaient doux ces instants partagés

Ma main dans ta main, mes yeux dans tes yeux, nous allions par les bois ombragés, par les chemins parsemés de fleurs des champs.

Nous nous arrêtions souvent, nous nous embrassions, nous nous enlacions.

Nous regardions ensemble vers les mêmes horizons.

Qu’ils étaient beaux ces jours heureux.

 

31 janvier 2022

Au cours des séances précédentes, les écritures prenaient souvent la forme d'opinions, d'avis, d'émotions. Rares sont les mises en scène d'une situation d'automne (novembre), d'un personnage face au dragon (décembre) ou cheminant (janvier). Comme le souhait de construire une narration a été formulé ; chaque membre est invité·e à bâtir un "conte" personnel, en passant par les étapes classiques.

Afin de stimuler l'imagination, des photos ont été projetées ; chacun avait le droit de s'en inspirer ou de laisser libre cours à sa fantaisie.

 

Texte A

Céline s’approche de l’armoire, il faut s’habiller, mais elle pense à Julien. Son regard est triste, lointain. Que devient leur amitié si forte ? Céline, Julien, deux amis inséparables, gais, heureux de tout partager, tout ? Non, Julien envisage sa vie avec elle. Céline pense à ses examens, ses motivations, ont changé. Elle veut réussir sa carrière avant tout. Elle doit voir Julien ; elle doit trouver ses mots, lui expliquer que son amitié est forte et importante. Mais elle craint les réactions de Julien, si entier. Elle est triste et nonchalante. Il faut s’habiller, dit-elle !

 

Texte B

Agnès

Elle a passé une mauvaise nuit, pleine de cauchemars, de moments d’insomnie, où les idées sombres se bousculaient dans sa tête. Agnès se lève, mélancolique, elle se demande ce qui lui arrive, redoutant la vérité, la simple et dure vérité.

Inutile de se voiler la face plus longtemps. Au bord des larmes, elle finit par reconnaître qu’il est parti, qu’elle l’a abandonnée, qu’elle ne le reverra plus.

La vérité lui déchire le cœur. Agnès fond en cris et en sanglots, elle aurait presque envie d’en finir, elle aussi. L’idée lui traverse la tête, mais un instinct de vie, un sursaut de colère lui disent que le fuyard n’en vaut pas la peine. D’ailleurs, songe-t-elle devant la fenêtre où elle a vu sa dernière image, il ne le saurait pas ou s’en foutrait comme il a toujours fait.

Agnès rage. Pourquoi est-il parti ? Elle revoit les moments partagés, les embrassades folles, les virées main dans la main, cœur contre cœur. Des souvenirs à jeter désormais au panier. Du bonheur transformé en chagrin.

La vérité s’impose avec rigueur. Agnès s’oblige à reconnaître la raison profonde de sa solitude : Geoffroy est un lâche, n’assumant que ses conquêtes et ses exploits amoureux, mais jamais il ne sera capable d’être le père de l’enfant qu’elle porte.

 

Texte C

L’attente

Adèle, jeune femme d’une trentaine d’années, sort lentement de sa chambre. Cela fait plus d’une heure qu’elle regarde le rai de lumière de la porte d’entrée.

Elle se tient debout face à la verrière du couloir, comme si elle était aimantée par cette vitre ; devant elle, la lumière l’invite à rester. Derrière elle, sa chambre est encore noire : elle attend le retour de Jean, en tout cas, elle l’espère !

Pourquoi est-il parti si vite, hier soir ; il lui promettait pourtant de passer la nuit avec elle, comme il en a l’habitude depuis trois mois.

Adèle guette tous les bruits ; elle reconnaîtrait facilement l’arrivée de Jean sur sa grosse cylindrée, rien de tout ça !

Les yeux d’Adèle fixaient avec peine le sol de l’entrée. Par terre Jean avait laissé un sac-à-dos.

— Il reviendra ! se dit-elle, il me reviendra, même si ce matin, il est encore avec sa femme.

Adèle se décide enfin à quitter cette porte qui ressemblait trop à un miroir triste.

Elle fit demi-tour, entra dans la chambre, prit une serviette de bain, son jean et son pull et alla prendre sa douche.

 

Texte D

Réveil de Véronique

Véronique avait toujours eu du mal à abandonner son lit. En cette période de vacances avec ce beau soleil, elle s’était dirigée vers la porte-fenêtre de sa chambre pour regarder dans le jardin. Elle avait déjà ouvert les rideaux avant de se renicher un peu ; c’était une grosse dormeuse.

Minet en poussant la porte avait attiré son regard. Mal fermée elle séparait sa chambre d’ado du couloir qui menait à la cuisine. Une odeur de pain grillé avait envahi la chambre à l’entrée du minou.

Irait-elle avec le chat dans le jardin ou rejoindrait-elle sa mère dans la cuisine ? En voyant son reflet, elle se dit qu’elle avait eu raison de faire un brin de toilette et surtout de bien lisser avec sa nouvelle brosse ses beaux cheveux châtains avec ses reflets acajou. Elle les laissait pousser depuis son adolescent.

Il lui semblait bien avoir entendu un bruit : était-ce Stéphane qui était déjà là, pour lui proposer d’aller à la plage ? Dans ce cas, elle ne pourrait pas sortir, à peine couverte dans le jardin et Minet comme chaperon lui parut insuffisant.

Trois êtres au moins l’aimaient dans ce monde : Minet, sa mère et Stéphane. Elle avait envie de passer de belles vacances !

 

Texte E

Habillée à la hâte, elle admire son bébé encore endormi et réalise qu’elle est maman, heureuse, mais pleine de doutes quant à l’avenir ; sera-t-elle à la hauteur ? Et ce petit être pur va s’éveiller à la vie, ce seront des gazouillis, des sourires et il va se découvrir, reconnaître son entourage, les premiers pas.<

Viendront pour cette maman les soucis de l’avenir de son enfant : santé, études, fera-t-il du sport ? Dans quelle branche se destinera-t-il ? Tout cela est bien prématuré. Soyons heureux de cette naissance et jouissons de cet évènement, faisons en sorte de lui donner du bonheur, en lui inculquant les bonnes bases pour une parfaite réussite de sa vie d’adulte.

 

Texte F

J’adore les animaux sauvages pour cela : voilà la fin de vie d’un lion que l’on s’attend d’habitude à voir dans la savane.

Simba est en retraite et provient d’un cirque désaffecté.

Il a été adopté par une famille ayant les moyens de l’accueillir ; au sein de cette famille vit Julie une petite fille de sept ans, elle est devenue complètement amoureuse de ce lion qui avait aussi été élevé avec une autre petite fille. Chaque jour il se retrouvait avec des caresses, des mamours, sous l’œil inquiet et vigilant du papa. Cette histoire se passe à la campagne avec en toile de fond une propriété de plusieurs hectares avec une clôture aux normes ; mais Simba lui aspire toujours à la liberté et a été entraîné pour faire des sauts.

Malheureusement, un jour le roi de la jungle a réussi à franchir l’obstacle qui le séparait de la liberté. Il a été rattrapé, enfermé, puis réexpédié dans la savane.

Chaque année, Julie se rendait là-bas pour le revoir et comme c’était un lion relativement jeune, il a pu refaire une famille.

Un jour, Julie est revenue avec un bébé pour mettre à la place du papa et l’élever dans de bonnes conditions avec plein de câlins.

 

Texte G

Une histoire chouette

Elsa a dix ans et vit dans une maison près de la forêt. Son papa est garde-forestier, elle adore l’accompagner pour observer les animaux.

Après le passage d’un bûcheron, elle découvre au pied d’un grand sapin une petite boule blanche et s’aperçoit qu’il s’agit d’un bébé oiseau. Son papa lui a toujours expliqué qu’on ne devait pas prendre les animaux sauvages pour les ramener à la maison. Le bébé tout tremblant lui fait pitié en ce mois de février. Il est condamné, elle en est certaine ; il va mourir de froid ou être mangé par un renard. À l’insu de son père, elle le ramasse et le ramène chez elle, dans une petite cabane que son papa lui a construite, c’est son domaine. Une boîte en carte, quelques feuilles lui serviront de nid. Le plus difficile reste à faire : quel est cet oiseau ? Comment le nourrir ?

Elsa ferme la cabane, rentre à la maison et s’installe devant l’ordinateur : c’est une chouette hulotte dont le duvet est blanc les premiers jours. Sa nourriture : des souris, mais elle est encore trop petite ; pour l’instant, elle se contentera de steak haché, il y en a dans le frigo.

Pendant plusieurs semaines, Elsa s’est occupée de la petite chouette qui lui montrait son affection en lui caressant la main avec son bec et Elsa lui faisait des papouilles sur la tête. Vint le moment où il fallut trouver des souris, car la gourmande avait très faim. Elle réussit à en découvrir autour des tapettes dans le bâtiment.

La petite chouette commençait à voler, à se promener sur l’épaule d’Elsa qui lui apprit aussi à chasser en accrochant une souris morte au bout d’une ficelle. La petite fille savait qu’il fallait la relâcher maintenant, ce qu’elle fit un jour de soleil mais avec un pincement au cœur.

Depuis, chaque soir, un oiseau silencieux survole sa maison et Elsa se dit que c’est peut-être sa petite chouette.

 

Texte H

— Demain, c’est jour de grande marée, dit mon père, il fera beau ; si on allait à la pêche ?

L’idée fait l’unanimité. En cette période de vacances, la maison est pleine : enfants, petits-enfants, oncle, tante, cousins, cousines.

Le lendemain, une longue file s’étire sur le sentier qui mène au lieu de pêche. Arrivé à bon port, chacun prend son matériel, seaux, crocs, râteaux, et s’élance vers son coin préféré. Il y a ceux qui vont aux tourteaux, étrilles, ormeaux. Nous, les enfants, suivons mon père armé de son croc, nous nous dirigeons vers les rochers ; il commence à tâtonner à la recherche de son poisson roi : le congre. Après plusieurs essais, nous entendons un bruit sourd.

— Il y en a un ici, et je crois qu’il est gros, dit mon père.

Alors commence le combat entre la bête et l’homme. Mon père avance le croc doucement, le congre attaque l’engin qui envahit son espace.

La danse peut durer toute la marée. Tout d’un coup, nous entendons un grand remous.

— Ça y est, je le tiens, préparez-vous.

Aussitôt nous montons sur le rocher et nous préparons nos manches d’haveneau. Mon père s’accroche à son anse et tire doucement vers lui ; le congre se débat de toutes ses forces. Enfin il sort, aussitôt il est lancé sur le rocher où nous sommes perchés et c’est alors une véritable sarabande autour de lui.

— Tapez-lui sur la queue, ça le paralyse.

Tout à coup la bête s’immobilise et devient flasque, l’homme a gagné. Nous revenons et traversons la grève tout fiers, le congre en travers des épaules de mon père, il fait au moins 1 mètre 70 et pèse dix à douze kilos.

Nous croisons d’autres pêcheurs à pied qui saluent mon père et lui disent  :

— T’as encore eu une belle bête, François, et c’est bien toi le roi.

Nous, les enfants, nous redressons comme si les compliments étaient pour nous. Mon père me prend la main, et s’il est le roi, moi, à ce moment-là, je sais que je suis sa reine.

 

17 janvier 2022

Consigne : Les participants reçoivent la première page de la nouvelle Ainsi va le monde, ils apportent les modifications selon leur goût. Dans le temps imparti, les versions sont complètes ou partielles.

 

Version A

Aux premières lueurs de l’aube, les brumes de Combrailles avalent un marcheur infatigable ; la forêt dense ne laisse rien percevoir, puis s’écarte et révèle les premiers bâtiments. L’homme approche de son but, il presse le pas ; de retour après plusieurs années d’exil, il retrouve la Chartreuse de Port Sainte Marie, sa maison. Après l’avoir connue en tant que vicaire, il vient prendre la place de prieur. Depuis la Normandie, Dom Gerle a traversé le royaume de France qui gronde, crie famine et accuse son roi et les nobles de l’appauvrir sans cesse. La Chartreuse lui apparaît comme un havre de paix, loin des tumultes, un ermitage à l’abri, protégé par les éléments naturels : l’eau des rivières et des brumes, les terres vallonnées volcaniques nourrissant une forêt épaisse. Depuis plus de cinq siècles, les Chartreux prient pour le monde, qui en a encore besoin en ce jour de l’an 1788.

Dom Gerle se présente devant le portail d’entrée. Il ne souhaite pas perturber la quiétude des lieux et préfère une entrée discrète. Au moment de passer la porte, il entend l’appel des cloches, les frères entament un chant profond. Dom Gerle sent l’émotion l’envahir d’être revenu au sein de sa famille.

La Chartreuse a bien changé depuis son départ : elle compte désormais dix-neuf cellules autour de la cour extérieure, ses toitures découpées et son fier portail lui donnent des allures de forteresse aux murailles crénelées. L’église domine, invitant chaque frère à lever la tête vers les cieux et ne pas oublier ses vœux.

Aux yeux de Dom Gerle, les bâtiments forment un écrin admirable pour le trésor confié aux frères chartreux de Port Sainte-Marie : une relique de Saint-Bruno dans une châsse exceptionnelle. Les reliquaires adoptent souvent une forme de coffre, rappelant un tombeau, celui-ci apparaît comme une curiosité. Dom Gerle le retrouve et l’observe avec dévotion : une interprétation du blason de l’ordre des Chartreux lui sert de réceptacle. Réalisé par un orfèvre inconnu, même le support est doré avec sept étoiles serties de rubis, entourant le globe du monde. Il reçoit les épisodes de la vie du saint en un bas-relief réhaussé d’émail limousine. Trois épisodes de la vie de Bruno rappellent le songe qu’il reçut, sa rencontre avec l’évêque Hugues et sa vie dans le désert avec ses compagnons. Une croix étincelante surmonte le globe ; quatre diamants symbolisent les clous qui torturèrent le Christ. D’ordinaire, le nouveau prieur ne s’attache pas aux objets, à leur matérialité, mais il admire cette châsse, ce trésor.

Dom Gerle retrouve certains disciples et amis de longue date, au premier rang desquels les frères Bernard et Hugues, dont la vie se déroule entre prières et contemplation. Les frères chartreux forment une famille de solitaires où chacun cherche Dieu dans son propre "désert", avec le souhait d’accéder au Ciel.

Antoine Boucher a décidé de vivre ce repli du monde, malgré un passé houleux fait de rapines, d’escroqueries, d’usurpations de biens. Après bien des méfaits et avoir connu la richesse des bourgeois, il s’est laissé prendre à son propre jeu et voler sans se méfier : son propre fils avait hérité de ses talents perfides. Rejeté de la vie civile car n’ayant plus le sou, Antoine s’apprête à demander pardon et tenter le repentir. Il sollicite son entrée au monastère afin d’entamer une retraite de discernement ; peut-être que loin des tentations du monde et dépossédé, Antoine saura retrouver son chemin. Le prieur Dom Gerle admet sa candidature ; à ses yeux, chaque homme est capable du meilleur s’il retrouve et suit le chemin de Dieu. La Chartreuse accueille le postulant comme retraitant avec joie.

 

Version B

À l’aube, Dom Gerle, un marcheur avalé par les brumes des Combrailles, approche de son but. Après avoir traversé le royaume de France appauvri et criant famine, il retrouve en cette année 1788 le Chartreuse de Port Saint-Marie.

Il entre discrètement. Au même moment, un chant profond s’élève, qui le remplit d’émotion. La Chartreuse a bien changé depuis qu’il est parti, heureusement l’église domine toujours invitant chaque frère à lever la tête vers les cieux.

Jadis un trésor a été confié aux frères de la Chartreuse. Il consiste en une relique de saint Bruno conservée dans une châsse exceptionnelle, réhaussé de pierres précieuses, réalisé par un orfèvre inconnu et talentueux.

Dom Gerle retrouve au sein de la Chartreuse ses frères, les retraitants et surtout la sérénité.

 

Version C

À l’aube dans les brumes boisées de Combrailles, un voyageur approche la Chartreuse de Port Sainte-Marie. Il s’apprête à retrouver cette maison qu’il connut en tant que vicaire. Dom Gerle a traversé un royaume grondant, criant famine, accusant roi et nobles rapaces.

Depuis cinq siècles, l’ermitage est protégé par une forêt épaisse, l’eau des rivières, la terre volcanique et vallonnée. Alors qu’il essaie d’entrer discrètement, les frères l’accueillent par un chant profond qui le remplit d’émotion. La Chartreuse a maintenant dix-neuf cellules autour de la cour extérieure, mais possède toujours ses tours crénelées, façon forteresse, et l’église qui domine, obligeant toujours les frères à lever la tête vers les cieux.

Dom Gerle sait que les frères gardent les reliques de saint Bruno, conservées dans une châsse exceptionnelle, curiosité plus que coffre ou même tombeau, comme souvent. Elle a été dorée par un orfèvre talentueux avec Bruno et ses disciples parmi sept étoiles réhaussées de rubis. On y découvre trois épisodes de la vie de Bruno : le songe, la rencontre de l’évêque Hugues et la vie dans le désert avec ses compagnons. Le globe qui entoure le tout est surmonté d’une croix étincelante aux clous de diamant. Dom Gerle bien que peu attaché aux biens matériels aime ce trésor à l’égal de la communauté où il retrouve les frères Bernard et Hugues qui sont restés dans la recherche de Dieu au sein de leur « désert » pourtant peuplé de frères chartreux.

Antoine Boucher au lourd passé de méfaits puis de richesses indues, volé par son propre fils, est accueilli exceptionnellement cette semaine-là en tant que retraitant. Il est accueilli par Dom Gerle, nouveau prieur. Chaque home n’est-il pas capable du meilleur s’il trouve Dieu ?

 

Version D

À l’aube, les brumes de Combrailles avalent un marcheur infatigable. Cet homme approche de son but, la forêt dense ne laisse rien percevoir. Il presse le pas au terme de son voyage. La forêt s’écarte, révélant les premiers bâtiments. Ce périple signe le retour du marcheur après plusieurs années « d’exil ». Il retrouve sa maison, la Chartreuse de Port Sainte-Marie. Après l’avoir connue en tant que vicaire, il vient prendre la place de prieur. Depuis la Normandie, Dom Gerle a traversé un royaume de France, grondant, criant famine et accusant leur roi et les nobles de les appauvrir encore.

La Chartreuse apparaît comme un havre de paix. Un ermitage protégé par les éléments naturels exceptionnels : l’eau des rivières et des brumes, les terres vallonnées, volcaniques nourrissant une forêt épaisse. Depuis plus de cinq siècles ici, les chartreux prient pour le monde et il en a bien besoin en ce jour de l’an 1788. Dom Gerle se présente devant le portail d’entrée. Son entrée, il la veut discrète, alors qu’il entend l’appel des cloches de l’église. Il passe la porte quand ses frères entament un chant profond. Dom Gerle est envahi par l’émotion, se sentant accueilli au sein de sa famille. La Chartreuse a bien changé depuis qu’il est parti. Elle compte désormais dix-neuf cellules disposées autour de la cour extérieure. Avec ses toitures découpées, son portail réhaussé, elle prend des allures de forteresse aux murailles crénelées. L’église domine toujours, invitant chaque frère à lever la tête vers les cieux.

Aux yeux de Dom Gerle ces bâtiments forment un écrin admirable. Un trésor a été confié aux frères chartreux de Port Sainte-Marie, nombreux à le protéger : une relique de Saint-Bruno conservée dans une châsse exceptionnelle. Les reliquaires adoptent une forme de coffre, rappelant un tombeau, celui-ci apparaît comme une curiosité. Dom Gerle l’admire à nouveau : une interprétation du blason de l’ordre des chartreux sert de réceptacle. Il a été réalisé par un orfèvre inconnu mais talentueux. Le support doré porte sept étoiles réhaussées de rubis, Bruno et ses disciples. En son sein se love le globe figurant le monde. Une structure dorée reçoit trois épisodes de la vie de saint Bruno en bas-relief réhaussé d’émail limousine : le songe, la rencontre avec l’évêque Hugues et la vie dans le désert avec ses compagnons. Le globe est surmonté d’une croix étincelante, flanquée de quatre diamants symbolisant les clous dont a été percé le Christ. Si le nouveau prieur ne s’attache pas aux objets, à la matérialité, cette châsse reste un trésor qu’il admire. Dom Gerle retrouve certains « disciples » et amis de longue date, les frères Bernard et Hugues. Leur vie se déroule entre prière et contemplation. Les frères chartreux sont une famille de solitaires où chacun cherche Dieu. La spécificité de ces moines est de créer son propre « désert » pour accéder à Dieu. Antoine Boucher a décidé de vivre ce repli du monde. Cet homme porte un lourd fardeau : un passé houleux fait de rapines, d’escroqueries, d’usurpations de biens. Après bien des méfaits et après avoir connu la richesse des bourgeois, il s’est fait prendre à son propre jeu. Il a fini par être volé sans se méfier ! Et pour cause, son propre fils avait hérité des talents perfides de son père… Rejeté de la vie civile, Antoine demande pardon et se repentit. La Chartreuse l’accueille en tant que retraitant. Antoine est une des rares personnes extérieures à être admis. Il a demandé à entrer au monastère pour entamer une retraite de discernement, avant de confirmer son souhait d’intégrer la communauté. Peut-être que loin des tentations du monde, et dépossédé, Antoine saura retrouver son chemin ! Il est accueilli avec joie par le prieur Dom Gerle. Chaque homme pour lui est capable du meilleur s’il retrouve et suit le chemin de Dieu.

 

Version E

Dans les brumes de Combrailles, un marcheur infatigable après des années retrouve sa maison, la Chartreuse de Port Sainte-Marie, à l’époque où la France crie famine et accuse son roi et les nobles de la ruiner.

La Chartreuse est en fait un ermitage à l’abri, protégée naturellement par une forêt épaisse. Depuis plus de cinq siècles, les chartreux viennent prier ici en ce jour de l’an 1788.

Dom Gerle se présente devant le grand portail d’entrée au moment où la cloche retentit. Alors qu’il veut être discret, ses frères entament un chant en son honneur. La Chartreuse a bien changé, elle compte dix-neuf cellules disposées autour de la cour extérieure, une véritable forteresse aux murailles crénelées, l’église domine toujours.

Aux frères chartreux de Port Sainte-Marie a été confié un trésor : une relique de saint Bruno conservée dans une châsse exceptionnelle. Les reliquaires adoptent traditionnellement une forme de coffre, rappelant un tombeau ; la châsse apparaît comme une curiosité que Dom Gerle admire à nouveau, le blason de l’ordre des Chartreux sert de réceptacle, réalisé par un orfèvre inconnu mais talentueux. Le support entièrement doré porte sept étoiles réhaussées de rubis : Bruno et ses disciples, où se love en son sein le globe du monde. Cette structure dorée reçoit les épisodes de la vie de Bruno : le songe, la vie de l’évêque Hugues dans le désert. Sur le globe, une croix étincelante, avec quatre diamants symbolisant les clous dont a été percé le Christ. En règle générale, le prieur ne s’attache pas aux objets, à la matérialité, mais cette châsse reste un trésor qu’il ne peut s’empêcher d’admirer. Dom Gerle retrouve certains disciples : les frères Bernard et Hugues. La vie se déroule en prières et contemplation. Les frères sont une famille de solitaires, ils cherchent dans la solitude à accéder individuellement à Dieu. Parmi eux se trouve un homme au lourd fardeau, après bien des méfaits, il s’est fait prendre à son propre jeu. Il a fini par être volé sans se méfier par son propre fils qui avait hérité des talents perfides de son père. Cette semaine-là, la Chartreuse l’accueille en tant que retraitant. Antoine est une des rares personnes extérieures à être admises, il a demandé à entrer au monastère pour entamer une retraite ; peut-être que loin des tentations du monde et dépossédé, Antoine saura retrouver son chemin. Il est accueilli avec joie par le prieur Dom Gerle. Chaque homme est capable du meilleur, s’il accepte le chemin de Dieu.

 

Version F

Très tôt, un marcheur traversait la commune de Combrailles. Cet homme arrivait au terme de son voyage. Cette fin représentait des années d’exil.

Enfin la Chartreuse de Port Sainte-Marie apparut. Il l’avait connue en tant que vicaire, aujourd’hui il revenait comme prieur. Dom Gerle a traversé le royaume de France ; la révolte contre le roi, les nobles, la famine, faisait se lever le peuple déjà en cette année de 1788.

Dom Gerle arrive à l’entrée de la Chartreuse. Il ne souhaite pas perturber les lieux, il veut entrer discrètement. Alors qu’il entend les cloches de l’église, il passe la porte, et à ce moment, ses frères entament un chant profond. L’émotion est là, il se sent accueilli au sein de sa famille.

La Chartreuse a pourtant bien changé depuis son départ. Elle compte dix-neuf cellules disposées autour de la cour. Avec ses toitures découpées, son portail réhaussé, elle prend des allures de forteresse. L’église domine toujours les lieux et invite chaque frère à lever la tête vers les cieux, pour ne pas oublier ses vœux.

Pour Dom Gerle, les bâtiments sont un écrin admirable. Les frères chartreux gardent un trésor et sont très nombreux à le protéger. La relique de saint Bruno conservée dans une châsse exceptionnelle. Contrairement aux autres reliquaires qui adoptent une forme de coffre, ressemblant à un tombeau, celui-ci est particulier. Dom Gerle l’observe avec admiration. C’est le blason de l’ordre des chartreux qui en est le réceptacle. Il a été réalisé par un inconnu talentueux. Même le support est doré, il porte sept étoiles réhaussées de rubis, Bruno et ses disciples. En son sein se trouve le globe figurant le monde. On y voit les trois épisodes de la vie de Bruno : le songe, la rencontre avec l’évêque Hugues et la vie dans le désert. Sur le globe, se trouve une croix étincelante, avec quatre diamants symbolisant les clous de la crucifixion du Christ. Le nouveau prieur n’est pas matérialiste, mais cette châsse est un trésor qu’il ne peut s’empêcher d’admirer.

Dom Gerle retrouve certains « disciples » et amis de longue date ; parmi eux, les frères Bernard et Hugues. La vie se déroule entre prières et contemplations. Les chartreux sont une famille de solitaires, chacun cherche Dieu dans son « désert ». C’est bien une spécificité des moines de créer sa solitude individuellement. Ce repli, c’est ce que cherche à vivre Antoine Boucher. Cet homme a un lourd passé, fait de vols, d’escroqueries en tout genre. Après ces méfaits et avoir connu la richesse des bourgeois, il a été volé par son propre fils qui avait bien hérité des talents de son père.

 

03 janvier 2022

Consigne : Par les chemins du monde ouvert...

 

Texte A

Cette formule me fait penser aux chemins de randonnées où chacun peut en profiter à sa façon, à sa guise : faire de l’exercice, se vider la tête en marchant et oublier les soucis présents, profiter de la vie tout simplement et du temps dont on dispose. Nous pouvons en conséquence découvrir le monde en toute liberté, à ciel ouvert, ici ou ailleurs, au choix et au bon vouloir de chacun. Il suffit de ne pas être pris par le temps et pouvoir se mouvoir sans difficulté comme la « valse à trois temps ».

Le monde est ouvert à chacun, l’essentiel est d’en profiter à sa manière, en allant toujours de l’avant, de façon à enrichir ses connaissances de l’univers qui nous entoure.

 

Texte B

Si tous les gens du monde pouvaient se donner la main, on pourrait faire une grande ronde tout autour de la Terre. (1)

Ce début de poème résume la nécessité et l’urgence pour les humains d’être solidaires face aux dangers qui menacent notre planète. Tous les pays du monde sont touchés par des catastrophes : pandémie, cataclysmes, famine, etc.

Je crois aux valeurs humaines et reste confiante dans les solutions que les hommes vont trouver pour sauver la planète.

Ah que la Terre est belle

Crie une voix là-haut

Ah que la terre est belle

Sous le beau soleil chaud

Elle est encore plus belle

Bougonne l’escargot

Elle est encore plus belle

Quand il tombe de l’eau

Vue d’en bas, vue d’en haut

La Terre est toujours belle

Et vive l’hirondelle

Et vive l’escargot. (2)

(1) Paul Fort – (2) Pierre Menanteau

 

Texte C

Si l’on considère que le monde se limite à la Terre, nous en avons fait le tour et par conséquent les chemins ont tous été ouverts.

Si, au contraire, l’on considère que le monde s’étend à l’univers, il reste beaucoup de chemins à ouvrir. Quelques-uns ont déjà été explorés. Pour quelles raisons veut-on les ouvrir :

- pour la curiosité ?

- pour le profit ?

- pour la sélection ?

Nous avons déjà presque détruit la Terre, pourquoi voulons-nous tuer les autres planètes ? Sommes-nous si mauvais ou est-ce le cours de la vie ? Nous pensons peut-être qu’en continuant à courir ailleurs, nous trouverons l’éternité, ce fol espoir des hommes.

Les futures générations le trouveront peut-être ou pas !

 

Texte D

Hugues s’extasie devant les cadeaux étalés au pied du sapin ; il ne sait où donner de la tête. Après moult hésitations, il opte pour le paquet rouge aux étoiles dorées. Il vient de sa grand-mère qui ressent une sorte de fierté à être l’heureuse élue. À l’intérieur, le gamin trouve le gros livre dont il rêve quand il va à la bibliothèque ; là-bas, il le feuillette tant qu’il est permis, par chance, l’ouvrage classé parmi les usuels reste toujours dans les rayons. Le jeune lecteur tourne les pages avec respect, presque dévotion. Pour l’inscrire dans sa liste de souhaits, il en a appris le titre par cœur et s’est renseigné sur le sens de chaque mot : atlas géographique.

Maintenant le livre lui appartient, Hugues a le droit de le regarder jusqu’à épuisement, d’aller d’une page à l’autre, de l’ouvrir où bon lui semble. Sans attendre, le garçon vole d’Europe en Afrique, passe de Dakar à Rio de Janeiro, glisse des États-Unis au Canada, croise un Chinois et salue un pygmée. Il a vite compris que tous les chemins du monde s’étirent sous ses yeux, qu’il les parcourt avec l’insouciance de ses dix ans et que personne ne peut l’empêcher de circuler. Il entre dans les images qui bordent les cartes et se découvre emmitouflé comme un esquimau, un arc à la main, en pirogue ou déguisé en roi coloré.

Les cadeaux des parents, des oncles et tantes attendent au pied du sapin ; Hugues ne semble pas s’y intéresser. Il est aux quatre coins du monde, tandis que la famille se vexe de percevoir son enthousiasme comme un signe d’indifférence. Quand tous les présents sont déballés, commentés, empilés, le père d’Hugues oblige son enfant à ouvrir ceux qui lui sont destinés ; brisant d’un coup le rêve d’évasion et de liberté.

 

Texte E

L’ouverture du monde a pour moi quelque chose d’incompréhensible ou, pour le moins, trop ambitieux. Imaginer emprunter les chemins qui mènent à ce monde me dépasse.

Tel chemin peut conduire d’un point A à un point B à pied, à cheval, en voiture, en bateau ou en avion, mais le seul chemin qui m’intéresse est celui qui s’élève au sommet de soi-même ou à l’amour des autres. Jésus ne dit-il pas « je suis le chemin » (Ego sum via) ? Ceux qui passent par moi iront vers le Père. Tous les chemins d’un monde, qu’ils soient ouverts ou fermés, ne peuvent mener qu’à soi-même et à Dieu. Tout le reste est littérature. Et d’ailleurs qu’écrirait-on si cette question ne se posait pas ?

Enfant, le monde ouvert s’arrêtait au bout des chemins qui formaient une étoile autour de ma maison. Aujourd’hui, même les étoiles déménagent (?) ; s’approcher pourrait me sembler un nouveau but, pourtant il n’en est rien depuis que j’ai lu tous les livres que mes pauvres yeux supportent encore.

 

Texte F

Si je chemine sur les routes des pays démocratiques, je vais aller partout. Les restrictions et les interdictions ne me seront que rarement appliquées. Donc, restons dans cette zone claire ; en tout cas pour les découvertes possibles.

Le cheminement de ma pensée est freiné ou fermé par mon inconscient, qui m’interdit l’accès à une seule idée ou image. C’est sans doute le poids de l’éducation (familiale, religieuse, morale) qui me limite ainsi.

Pour cheminer sereinement et presque sans obstacles, il faut que tous les leviers soient dégagés de toutes les contraintes, en ces moments seulement, la Terre se visite pleinement, sereinement et légèrement.

Ainsi un voyage se termine, un autre commence.

 

20 décembre 2021

Consigne : à quelques jours du Nouvel an, les deux premiers paragraphes d'un conte chinois sont lues. Les participants sont invités à prolonger l'amorce, s'en inspirer ou s'en détourner...

 

Il y a bien longtemps, quand des dragons puissants vivaient sur la terre et dans les mers, personne ne célébrait le nouvel an. Même dans un certain village, ce jour était le plus mauvais jour de l'année parce qu'un habitant avait tué un dragon des mers.

Tout le monde sait que c'est une chose terriblement malheureuse à faire, car le fantôme du dragon revenait hanter le village chaque année à l'aube du nouvel an.

 

Texte A

Heureuse d'être française et fêter la nouvelle année à notre façon et pas avec des coutumes chinoises, les dragons m'ont toujours effrayée.

Dans l'horoscope chinois je suis "serpent", ça va, je préfère les reptiles aux rongeurs.

Pour en revenir à ces Chinois voici l'année nouvelle qui se profile et non seulement ils ont de drôles de coutumes, mais ils nous ont envoyé ce vilain virus qui n'en finit pas de se propager, et comme s'en débarrasser? Nous aussi nous souviendrons de ce fléau et il va nous falloir vivre avec.

Vive 2022, peut-être l'espoir d'oublier, les Dragons viendront-ils à bout du virus ?

 

Texte B

Pourquoi ces échanges de souhaits pour franchir le cap de la nouvelle année ? Nous démarrons une page incon-nue de notre vie et tous les espoirs sont là pour accueillir cette étape.

Les cœurs sont gais, l'allégresse est au rendez-vous.

Nous sommes en famille, avec des amis.

Nous voulons que ce premier jour serve de fil conducteur à l'année qui arrive et nous offre une nouvelle année de vie.

 

Texte C

Si tout le monde croit aux dictons, moi non ; mais heureusement qu'il y en a pour perpétrer certaines légendes.

Je crois moi qu'il faut avoir la chance de pouvoir atteindre la nouvelle année.

Cette nouvelle année, il faut pouvoir l'accueillir avec de bons sentiments, oublier les malheurs passés de la précé-dente et faire des projets pour pouvoir ensuite repartir de l'avant (sans le dragon).

D'ailleurs je ne sais pas si c'est un proverbe chinois : "un tiens vaut mieux que deux tu l'auras". "Honni soit qui mal y pense, toujours est-il que si je ne crois pas aux dictons chinois tant mieux : car dans ce cas c'est donc pas eux qui nous ont apporté la Covid.

Bonne année et bonne santé à tous.

 

Texte D

Il était une fois en Chine, dans un petit village, une petite fille très pauvre et très gentille qui s'appelait Ling.

Son père, un homme très méchant, avait tué le dragon qui protégeait le village et ses habitants.

Depuis, le soleil s'était caché derrière les nuages, la pluie noyait les récolte, le gel et la neige faisaient mourir les nouveaux nés.

Ling était très triste et se demandait comment redonner espoir à tout le village.

Elle eut alors une idée. Dans une grotte sur la montagne, vivait une très vieille femme nommée Song. Elle avait, paraît-il, des pouvoirs extraordinaires.

Ling se mit en chemin pour aller la voir et lui demander conseil afin de faire cesser la malédiction.

Quand elle vit Lin, Song fut éblouie par l'amour qu'elle dégageait.

Ling expliqua à la vieille femme, qui lui dit : "Tu as beaucoup d'amour en toi, va jusqu'à la montagne du roi des dragons et implore-le de rendre la prospérité à ton village".

Ling se mit aussitôt en marche. La route fut longue et dure. Quand elle arriva devant le roi des dragons, elle se mit à genoux et l'implora, afin qu'il rende la prospérité à son village et donne la gentillesse à son père.

Le roi, touché par le sacrifice de Ling, l'exauça et le village retrouva la joie de vivre et le père de Ling sa gentil-lesse.

 

Texte E

Avant les mains meurtrières d'un homme, le temps ne se comptait pas, les années passaient sans semaines, sans mois, bref un temps sans repères "d'avant et d'après".

La nature avait un gros avantage sur les hommes qui passaient devant elle, ils se posaient des questions sur leurs transformations physiques et ne comprenaient pas pourquoi ils mouraient. Cette nature ne changeait pas et faisait vivre en son sein de terribles animaux... le Dragon en faisait partie.

Un homme prit peur de sa forte présence et pire même, hantait toutes ses nuits. C'est donc pour combattre ses peurs et avoir la paix qu'il décida, un jour, de tuer le Dragon. Ce ne fut pas simple, mais l'opération réussit.

Les années suivantes, l'homme et tous les autres dormaient et vivaient au rythme des saisons bien marquées dans leurs têtes (et sur un calendrier).

Les années, les décennies, les siècles se succédaient, annonçant le Premier de l'an avec le retour du fantôme du Dragon qui chaque fois terrorisaient les hommes...

À ce moment, tous comprirent que le temps leur était compté car les plus anciens ressemblaient à des squelettes et les plus jeunes avaient peur de leur ressembler.

 

Texte F

Ne pas tuer le dragon des mers, c'est pour moi ne pas se séparer des scories annuelles d'un être imaginaire. Comment allumer un nouveau feu dans une cheminée pleine de cendres.

Chaque année nouvelle représente pour les hommes, depuis très longtemps, un nouvel espoir, un nouveau départ. Pour les Italiens, ce sont les lentilles qui sont des promesses d'argent ou les bouteilles de prosecco consommées sur certaines places et jetées par-dessus l'épaule pour qu'un dieu bienveillant les remplace.

Je me suis retrouvé bien surpris de ces coutumes au cours de mon voyage à Venise, à Rome et à Florence. La coutume du gui, du houx vert, des tables décorées, me sont autant de promesses de minuscule éternité. Une éter-nité à l'échelle humaine pour ainsi dire. Les souhaits, les vœux accompagnent même ceux qui nous ont précédés et offert de merveilleuses fêtes qui permettent encore aujourd'hui de ne jamais désespérer totalement.

nos parents dans la longue chaîne des générations ont tué bien des dragons pour nous. Seuls, peut-être, nos maîtres les Vikings trouveraient un peu d'estime dans nos cœurs oublieux de leurs exactions passées. En effet, ils avaient si fière allure sur leurs bateaux farouches.

Toutefois comme les cendres de l'âtre, ils ont été balayées depuis longtemps, non de la mémoire des hommes, mais dans leur nécessité de se réinventer chaque année, à chaque génération, à chaque siècle, à chaque millénaire, etc.

 

Texte G

Pour les habitants de ce village, la journée la plus pénible était celle où ils devaient fêter le nouvel an.

Cet homme qui avait tué le dragon avait-il eu raison de le faire ? Était-ce un terrible dragon cracheur de feu? Les habitants en avaient-ils peur ? Il était peut-être inoffensif, malgré son aspect effrayant.

Le tueur de dragon voulait prouver aux autres qu'il était courageux et espérait devenir un héros. Rien ne justifiait la mise à mort du "monstre" des mers.

Normal que le fantôme soit venu ensuite hanter le village. Il fallait maintenant réagir et trouver une solution.

Les habitants se réunirent et décidèrent, après maintes discussions, que le responsable devait demander pardon au fantôme. Ce qui fut dit fut fait et le héros du village affronta une nouvelle fois le dragon, enfin son fantôme, il se mit à genoux et lui demanda pardon.

Les habitants du village retrouvèrent le plaisir de pouvoir fêter à nouveau la nouvelle année. Ce dragon n'était pas si méchant, malgré son aspect hideux, un peu comme la Bête dans le conte "la Belle et la Bête".

 

Texte H

Le dragon menaçait le village de le brûler s'il ne versait pas une rançon en échange de son copain tué. Les anciens se réunirent et constatèrent qu'une telle exigence restait inédite, jamais un monstre n'avait posé un ultimatum de cette nature. Que lui donner pour calmer sa colère ? Plusieurs hommes courageux proposèrent de se cacher, attendre le dragon et le surprendre une bonne fois pour toutes ; une jeune mère redoutait que le piège n'entraînât le courroux des autres bêtes.

Le calendrier tournait, si vite que les villageois oublièrent de changer les dates et s'aperçurent, le 20 décembre, que l'année s'achevait dans dix jours. Branle-bas général : on cherchait la rançon à payer, le moyen d'éliminer la menace, les risque pour le village de ne pas se soumettre. Les habitants étaient en panne : nulle solution dans les esprits, la peur dans les yeux, le désespoir dans les cœurs.

Quant tout à coup, Monique, jeune fille au frais minois, unique enfant d'un couple qui prenait de l'âge, celle que tous les garçons rêvaient de marier, se présenta comme tribut à remettre au dragon. Les cris, les pleurs ne surent la convaincre que son dévouement était de la folie. Plus les édiles tentaient de la dissuader, plus Monique répétait son offre.

Le jour fatidique sonna. Le village encore endormi, le dragon poussa son appel funeste, renouvelant son exigence macabre. Monique se dressa devant lui et tendit ses paumes en signe de soumission.

Le dragon s'attendait à un coffre d'argent, un présent en or ou le renoncement des notables à tout honneur. Il n'imaginait pas recevoir une demoiselle et l'emporter avec lui. Prévenu des tortures de la vie en couple, il renonça à sa menace et prit la fuit au fond de l'océan.

Désormais, le village fête Monique le premier jour de chaque année et les jeunes filles ont la liberté de choisir leurs galants.

 

06 décembre 2021

Consigne : parmi 16 proverbes venus de pays européens, un jeu et un calcul ont désigné le proverbe danois pour s'en inspirer, le prolonger, l'illustrer ou s'en détourner...

Toute chose a une fin, sauf le saucisson qui en a deux.

 

Texte A

Ce proverbe ne me parle pas, il traduit la réalité de la vie : la naissance et la mort. L’image du saucisson qui aurait deux fins laisse penser à une vie après la mort.

Ce proverbe est sans doute très philosophique et demande d’approfondir la pensée.

 

Texte B

Toute chose a une fin, de ce fait, elle a aussi un début. Dès lors qu’elle a commencé le processus de fin est déclenché.

Pour ce qui concerne le saucisson, on peut le retourner, on change alors le cours de l’historie, la fin se retrouve au début.

Pour ce qui concerne la vie, c’est malheureusement impossible, la naissance entraîne inexorablement la fin.

Il vaut donc mieux être saucisson qu’un humain. C.Q.F.D.

 

Texte C

On peut imaginer que l’homme, comme le saucisson, a deux fins. Une comme fœtus, l’autre comme adulte, mais aussi qu’il a beaucoup plus de fins. Une comme enfant, une comme adolescent, une comme adulte productif et enfin une comme vieillard. Dans tous les cas, ce proverbe n’a aucun véritable sens si ce n’est pour le plaisir de faire un bon mot.

Si toutefois on veut quand même épiloguer il faut se souvenir que les meilleurs souvenirs d’enfance ont été écrits par des écrivains âgés pendant que les meilleurs livres de philosophie ont été écrits par des penseurs jeunes. Cependant en ce qui me concerne je n’ai jamais interrogé sur ce sujet ni mon charcutier, ni mon directeur de conscience et de ce fait manquant de références bibliographiques je me garderai de trancher. Le saucisson bien sûr, ce qui me ferait quatre fins.

 

Texte D

Il m’est impossible de comparer un saucisson à une fin en soi.

Bien sûr, pour moi, dans la vie courante, il y a bien des situations où les choses sont difficiles. On se dit qu’il y aura bien une fin à des soucis qui peuvent intervenir, et avec courage, on surmonte, on serre les dents et on positive, et comme ce pauvre saucisson : on décortique, on enlève la mauvaise peau, et à un moment, arrive le meilleur.

 

Texte E

Nous entamons, André et moi, une randonnée dans le Larzac. Les chemins sont bien balisés, le ciel est bleu, c’est très agréable. Mais il nous arrive souvent de regarder à droite, à gauche pour profiter pleinement du paysage.

Arrive ce qui devait arriver, plus de balises. Eh oui, nous sommes perdus. Nous nous arrêtons pour essayer de nous repérer sur la carte.

- Je pense que c’est à gauche, me dit André.

On y va, mais ce chemin ne doit pas être le bon, les heures passent, les kilomètres s’ajoutent. Il faut se rendre à l’évidence : on est perdu.

Heureusement, nous avons notre gourde d’eau bien fraîche dans le sac à dos, mais nous n’avons pas prévu de nourriture, car cette randonnée ne dure que trois heures normalement. Notre estomac crie famine et nos forces nous lâchent.

Soudain un aboiement, un chien et un berger gardant ses moutons. Nous nous approchons pour demander notre chemin et gentiment, il sort un saucisson et nous l’offre.

C’est la fin de la randonnée et du saucisson.

 

Texte F

Considérons que l’homme est une entité composée de matières (atomes, neutrons, molécules) ; il est comme les autres entités, une chose, mais vivante et pensante. Le développement de ces différentes composantes passe de la naissance à la mort, comme toute autre vie terrestre et astrale.

Nous pouvons, en regardant un saucisson, imaginer sa fin dans plusieurs décennies. Le saucisson (ou la banane) peut être pris par les deux bouts, on ne sait pas où est le début ou la fin de la chose.

Moralité : mieux vaut avoir une fin que de finir accroché chez le charcutier.

 

Texte G

C’est une histoire de fou. Et je ne sais si le mot se met au singulier, car la folie est unique, ou au pluriel, car ils étaient deux : Pierre et Paul. Chacun voulait manger du saucisson et souhaitait en croquer le dernier morceau ; ils commencèrent pas le couper en deux, mais ne purent se départager sur le morceau du début et celui de la fin. Ils convinrent donc qu’aucune ne donnait satisfaction.

Pierre proposa que le côté avec la ficelle représentait la tête du saucisson et l’autre côté les pieds ; mais Paul argua qu’on peut tout aussi bien foncer la tête la première que partir les pieds devant, concluant qu’aucun côté n’avait la queue par définition.

Il suggéra un tirage au sort pour déterminer quel morceau serait premier et lequel occuperait la seconde place, c’est-à-dire la dernière, puisqu’il n’y en avait que deux. Pierre se désola : celui qui désignera le dernier sera de fait le premier à être désigné, donc son titre sera usurpé. Qui se félicitera d’être un falsificateur ?

Après bien des palabres longues à rapporter et inutiles à la clarification du problème, ils se décidèrent à trancher le saucisson et à partager le tas de rondelles.

Pierre dégusta le premier morceau et s’arrêta net ; Paul le dévisagea et l’imita aussi net. Ils échangèrent alors leurs doutes : pour gagner le défi, faudra-t-il prendre en compte la dernière rondelle avalée à l’avenir ou la dernière tranchée par le passé et ensevelie dans le tas en vrac ?

Peut-être vous posez-vous la même question et souhaitez-vous connaître le point qui départagea les deux fous ?

Eh bien, ils sont morts de faim devant une écuelle de saucisson bien sec !

 

Une histoire pas-à-pas

Au cours des séances précédentes, les écritures prenaient souvent la forme d'opinions, d'avis, d'émotions. Rares sont les mises en scène d'une situation d'automne (novembre), d'un personnage face au dragon (décembre) ou cheminant (janvier). Comme le souhait de construire une narration a été formulé ; chaque membre est invité·e à bâtir un "conte" personnel, en passant par les étapes classiques. Afin de stimuler l'imagination, des photos étaient présentées ; chacun avait le droit de s'en inspirer ou de laisser libre cours à sa fantaisie.

 

Texte A

Céline s’approche de l’armoire, il faut s’habiller, mais elle pense à Julien. Son regard est triste, lointain. Que devient leur amitié si forte ? Céline, Julien, deux amis inséparables, gais, heureux de tout partager, tout ? Non, Julien envisage sa vie avec elle. Céline pense à ses examens, ses motivations, ont changé. Elle veut réussir sa carrière avant tout. elle doit voir Julien ; elle doit trouver ses mots, lui expliquer que son amitié est forte et importante. Mais elle craint les réactions de Julien, si entier. Elle est triste et nonchalante. Il faut s’habiller, dit-elle !

 

Texte B

Agnès

Elle a passé une mauvaise nuit, pleine de cauchemars, de moments d’insomnie, où les idées sombres se bousculaient dans sa tête. Agnès se lève, mélancolique, elle se demande ce qui lui arrive, redoutant la vérité, la simple et dure vérité.

Inutile de se voiler la face plus longtemps. Au bord des larmes, elle finit par reconnaître qu’il est parti, qu’elle l’a abandonnée, qu’elle ne le reverra plus.

La vérité lui déchire le cœur. Agnès fond en cris et en sanglots, elle aurait presque envie d’en finir, elle aussi. L’idée lui traverse la tête, mais un instinct de vie, un sursaut de colère lui disent que le fuyard n’en vaut pas la peine. D’ailleurs, songe-t-elle devant la fenêtre où elle a vu sa dernière image, il ne le saurait pas ou s’en foutrait comme il a toujours fait.

Agnès rage. Pourquoi est-il parti ? Elle revoit les moments partagés, les embrassades folles, les virées main dans la main, cœur contre cœur. Des souvenirs à jeter désormais au panier. Du bonheur transformé en chagrin.

La vérité s’impose avec rigueur. Agnès s’oblige à reconnaître la raison profonde de sa solitude : Geoffroy est un lâche, n’assumant que ses conquêtes et ses exploits amoureux, mais jamais il ne sera capable d’être le père de l’enfant qu’elle porte.

 

Texte C

L’attente

Adèle, jeune femme d’une trentaine d’années, sort lentement de sa chambre. Cela fait plus d’une heure qu’elle regarde le rai de lumière de la porte d’entrée.

Elle se tient debout face à la verrière du couloir, comme si elle était aimantée par cette vitre ; devant elle, la lumière l’invite à rester. Derrière elle, sa chambre est encore noire : elle attend le retour de Jean, en tout cas, elle l’espère !

Pourquoi est-il parti si vite, hier soir ; il lui promettait pourtant de passer la nuit avec elle, comme il en a l’habitude depuis trois mois.

Adèle guette tous les bruits ; elle reconnaîtrait facilement l’arrivée de Jean sur sa grosse cylindrée, rien de tout ça !

Les yeux d’Adèle fixaient avec peine le sol de l’entrée. Par terre Jean avait laissé un sac-à-dos.

— Il reviendra ! se dit-elle, il me reviendra, même si ce matin, il est encore avec sa femme.

Adèle se décide enfin à quitter cette porte qui ressemblait trop à un miroir triste.

Elle fit demi-tour, entra dans la chambre, prit une serviette de bain, son jean et son pull et alla prendre sa douche.

 

Texte D

Réveil de Véronique

Véronique avait toujours eu du mal à abandonner son lit. En cette période de vacances avec ce beau soleil, elle s’était dirigée vers la porte-fenêtre de sa chambre pour regarder dans le jardin. Elle avait déjà ouvert les rideaux avant de se renicher un peu ; c’était une grosse dormeuse.

Minet en poussant la porte avait attiré son regard. Mal fermée elle séparait sa chambre d’ado du couloir qui menait à la cuisine. Une odeur de pain grillé avait envahi la chambre à l’entrée du minou.

Irait-elle avec le chat dans le jardin ou rejoindrait-elle sa mère dans la cuisine ? En voyant son reflet, elle se dit qu’elle avait eu raison de faire un brin de toilette et surtout de bien lisser avec sa nouvelle brosse ses beaux cheveux châtains avec ses reflets acajou. Elle les laissait pousser depuis son adolescent.

Il lui semblait bien avoir entendu un bruit : était-ce Stéphane qui était déjà là, pour lui proposer d’aller à la plage ? Dans ce cas, elle ne pourrait pas sortir, à peine couverte dans le jardin et Minet comme chaperon lui parut insuffisant.

Trois êtres au moins l’aimaient dans ce monde : Minet, sa mère et Stéphane. Elle avait envie de passer de belles vacances !

 

Texte E

Habillée à la hâte, elle admire son bébé encore endormi et réalise qu’elle est maman, heureuse, mais pleine de doutes quant à l’avenir ; sera-t-elle à la hauteur ? Et ce petit être pur va s’éveiller à la vie, ce seront des gazouillis, des sourires et il va se découvrir, reconnaître son entourage, les premiers pas.<

Viendront pour cette maman les soucis de l’avenir de son enfant : santé, études, fera-t-il du sport ? Dans quelle branche se destinera-t-il ? Tout cela est bien prématuré. Soyons heureux de cette naissance et jouissons de cet évènement, faisons en sorte de lui donner du bonheur, en lui inculquant les bonnes bases pour une parfaite réussite de sa vie d’adulte.

 

Texte F

J’adore les animaux sauvages pour cela : voilà la fin de vie d’un lion que l’on s’attend d’habitude à voir dans la savane.

Simba est en retraite et provient d’un cirque désaffecté.

Il a été adopté par une famille ayant les moyens de l’accueillir ; au sein de cette famille vit Julie une petite fille de sept ans, elle est devenue complètement amoureuse de ce lion qui avait aussi été élevé avec une autre petite fille. Chaque jour il se retrouvait avec des caresses, des mamours, sous l’œil inquiet et vigilant du papa. Cette histoire se passe à la campagne avec en toile de fond une propriété de plusieurs hectares avec une clôture aux normes ; mais Simba lui aspire toujours à la liberté et a été entraîné pour faire des sauts.

Malheureusement, un jour le roi de la jungle a réussi à franchir l’obstacle qui le séparait de la liberté. Il a été rattrapé, enfermé, puis réexpédié dans la savane.

Chaque année, Julie se rendait là-bas pour le revoir et comme c’était un lion relativement jeune, il a pu refaire une famille.

Un jour, Julie est revenue avec un bébé pour mettre à la place du papa et l’élever dans de bonnes conditions avec plein de câlins.

 

Texte G

Une histoire chouette

Elsa a dix ans et vit dans une maison près de la forêt. Son papa est garde-forestier, elle adore l’accompagner pour observer les animaux.

Après le passage d’un bûcheron, elle découvre au pied d’un grand sapin une petite boule blanche et s’aperçoit qu’il s’agit d’un bébé oiseau. Son papa lui a toujours expliqué qu’on ne devait pas prendre les animaux sauvages pour les ramener à la maison. Le bébé tout tremblant lui fait pitié en ce mois de février. Il est condamné, elle en est certaine ; il va mourir de froid ou être mangé par un renard. À l’insu de son père, elle le ramasse et le ramène chez elle, dans une petite cabane que son papa lui a construite, c’est son domaine. Une boîte en carte, quelques feuilles lui serviront de nid. Le plus difficile reste à faire : quel est cet oiseau ? Comment le nourrir ?

Elsa ferme la cabane, rentre à la maison et s’installe devant l’ordinateur : c’est une chouette hulotte dont le duvet est blanc les premiers jours. Sa nourriture : des souris, mais elle est encore trop petite ; pour l’instant, elle se contentera de steak haché, il y en a dans le frigo.

Pendant plusieurs semaines, Elsa s’est occupée de la petite chouette qui lui montrait son affection en lui caressant la main avec son bec et Elsa lui faisait des papouilles sur la tête. Vint le moment où il fallut trouver des souris, car la gourmande avait très faim. Elle réussit à en découvrir autour des tapettes dans le bâtiment.

La petite chouette commençait à voler, à se promener sur l’épaule d’Elsa qui lui apprit aussi à chasser en accrochant une souris morte au bout d’une ficelle. La petite fille savait qu’il fallait la relâcher maintenant, ce qu’elle fit un jour de soleil mais avec un pincement au cœur.

Depuis, chaque soir, un oiseau silencieux survole sa maison et Elsa se dit que c’est peut-être sa petite chouette.

 

Texte H

— Demain, c’est jour de grande marée, dit mon père, il fera beau ; si on allait à la pêche ?

L’idée fait l’unanimité. En cette période de vacances, la maison est pleine : enfants, petits-enfants, oncle, tante, cousins, cousines.

Le lendemain, une longue file s’étire sur le sentier qui mène au lieu de pêche. Arrivé à bon port, chacun prend son matériel, seaux, crocs, râteaux, et s’élance vers son coin préféré. Il y a ceux qui vont aux tourteaux, étrilles, ormeaux. Nous, les enfants, suivons mon père armé de son croc, nous nous dirigeons vers les rochers ; il commence à tâtonner à la recherche de son poisson roi : le congre. Après plusieurs essais, nous entendons un bruit sourd.

— Il y en a un ici, et je crois qu’il est gros, dit mon père.

Alors commence le combat entre la bête et l’homme. Mon père avance le croc doucement, le congre attaque l’engin qui envahit son espace.

La danse peut durer toute la marée. Tout d’un coup, nous entendons un grand remous.

— Ça y est, je le tiens, préparez-vous.

Aussitôt nous montons sur le rocher et nous préparons nos manches d’haveneau. Mon père s’accroche à son anse et tire doucement vers lui ; le congre se débat de toutes ses forces. Enfin il sort, aussitôt il est lancé sur le rocher où nous sommes perchés et c’est alors une véritable sarabande autour de lui.

— Tapez-lui sur la queue, ça le paralyse.

Tout à coup la bête s’immobilise et devient flasque, l’homme a gagné. Nous revenons et traversons la grève tout fiers, le congre en travers des épaules de mon père, il fait au moins 1 mètre 70 et pèse dix à douze kilos.

Nous croisons d’autres pêcheurs à pied qui saluent mon père et lui disent  :

— T’as encore eu une belle bête, François, et c’est bien toi le roi.

Nous, les enfants, nous redressons comme si les compliments étaient pour nous. Mon père me prend la main, et s’il est le roi, moi, à ce moment-là, je sais que je suis sa reine.

 

22 novembre 2021

Consigne : après avoir entendu les deux premiers paragraphes de la nouvelle NOVEMBRE de Gustave Flaubert, chaque participant pouvait s'en inspirer, la prolonger ou s'en détourner...

 

Texte A

J'aime pas l'automne. Les gens racontent que les couleurs sont belles, ça reste à voir ! Moi, je préfère l'été quand les filles sont en petites tenues : la couleur de la peau, c'est mieux que les feuilles mortes. Entre nous, tu aimes te calfeutrer chez toi ou, comme moi, sortir avec les copains et les copines à la piscine ou au parc Bayard ? On fiche rien, on discute, on se chamaille et on se marre !

Tandis qu'à l'automne, changement de programme : lycée toute la journée, devoirs le soir, entraînement le mardi, match le samedi. Et pense à ceci, et fais pas ça, et patati, et patata. Je l'ai déjà dit : j'aime pas l'automne !

Par-dessus le marché, les vieux ont imaginé un truc pour nous casser les pieds : la saison à peine commencée, ils changent l'heure. Obligé de rentrer, se coucher et tout le bataclan une heure plus tôt. Autant de temps en moins pour rien foutre avec les copains.

Moi, à leur place, j'aurais plus de courage : j'arrêterais l'année au mois d'août. D'ailleurs, si j'en crois le prof d'histoire, autrefois ils ont déjà changé le calendrier. On devrait se passer de l'automne.

 

Texte B

Pourquoi penser que l’automne est une saison triste ?

Parce que la chaleur de l’été n’est plus là ?

Parce que le froid de l’hiver commence à se faire sentir ?

Parce que les arbres perdent leurs feuilles ?

Mais n’est-ce pas tout simplement un endormissement, un repos afin de mieux renaître ensuite ?

Il y a tant de choses à admirer et à ressentir en automne. Allons en forêt observer les couleurs des feuilles mortes mises en valeur par les rayons bas du soleil, écoutons le bruissement qu’elles font sous nos pieds, humons cette douce odeur des champignons et arrêtons-nous un moment, sans bruit, pour observer : ah ! un chevreuil vient de passer prudemment au bout de l’allée, suivi d’un autre et puis d’un autre… Ne les dérangeons pas.

Nous sommes nous aussi à l’automne de notre vie, nous avons nous aussi besoin de nous reposer, même s’il n’est pas possible pour nous de renaître ensuite. La beauté de la forêt en cette saison nous apporte quiétude et réconfort.

 

Renseignements et inscription

Jean-Patrick : 06 74 15 35 91