Atelier d'écriture

31 janvier 2022

Une histoire pas-à-pas

 

Au cours des séances précédentes, les écritures prenaient souvent la forme d'opinions, d'avis, d'émotions. Rares sont les mises en scène d'une situation d'automne (novembre), d'un personnage face au dragon (décembre) ou cheminant (janvier). Comme le souhait de construire une narration a été formulé ; chaque membre est invité·e à bâtir un "conte" personnel, en passant par les étapes classiques.

Afin de stimuler l'imagination, des photos ont été projetées ; chacun avait le droit de s'en inspirer ou de laisser libre court à sa fantaisie. Quand une image est à la source du récit, elle est associée au texte (la même photo a inspiré plusieurs auteurs).

 

Texte A

Céline s’approche de l’armoire, il faut s’habiller, mais elle pense à Julien. Son regard est triste, lointain. Que devient leur amitié si forte ? Céline, Julien, deux amis inséparables, gais, heureux de tout partager, tout ? Non, Julien envisage sa vie avec elle. Céline pense à ses examens, ses motivations, ont changé. Elle veut réussir sa carrière avant tout. elle doit voir Julien ; elle doit trouver ses mots, lui expliquer que son amitié est forte et importante. Mais elle craint les réactions de Julien, si entier. Elle est triste et nonchalante. Il faut s’habiller, dit-elle !

 

Texte B

Agnès

Elle a passé une mauvaise nuit, pleine de cauchemars, de moments d’insomnie, où les idées sombres se bousculaient dans sa tête. Agnès se lève, mélancolique, elle se demande ce qui lui arrive, redoutant la vérité, la simple et dure vérité.

Inutile de se voiler la face plus longtemps. Au bord des larmes, elle finit par reconnaître qu’il est parti, qu’elle l’a abandonnée, qu’elle ne le reverra plus.

La vérité lui déchire le cœur. Agnès fond en cris et en sanglots, elle aurait presque envie d’en finir, elle aussi. L’idée lui traverse la tête, mais un instinct de vie, un sursaut de colère lui disent que le fuyard n’en vaut pas la peine. D’ailleurs, songe-t-elle devant la fenêtre où elle a vu sa dernière image, il ne le saurait pas ou s’en foutrait comme il a toujours fait.

Agnès rage. Pourquoi est-il parti ? Elle revoit les moments partagés, les embrassades folles, les virées main dans la main, cœur contre cœur. Des souvenirs à jeter désormais au panier. Du bonheur transformé en chagrin.

La vérité s’impose avec rigueur. Agnès s’oblige à reconnaître la raison profonde de sa solitude : Geoffroy est un lâche, n’assumant que ses conquêtes et ses exploits amoureux, mais jamais il ne sera capable d’être le père de l’enfant qu’elle porte.

 

Texte C

L’attente

Adèle, jeune femme d’une trentaine d’années, sort lentement de sa chambre. Cela fait plus d’une heure qu’elle regarde le rai de lumière de la porte d’entrée.

Elle se tient debout face à la verrière du couloir, comme si elle était aimantée par cette vitre ; devant elle, la lumière l’invite à rester. Derrière elle, sa chambre est encore noire : elle attend le retour de Jean, en tout cas, elle l’espère !

Pourquoi est-il parti si vite, hier soir ; il lui promettait pourtant de passer la nuit avec elle, comme il en a l’habitude depuis trois mois.

Adèle guette tous les bruits ; elle reconnaîtrait facilement l’arrivée de Jean sur sa grosse cylindrée, rien de tout ça !

Les yeux d’Adèle fixaient avec peine le sol de l’entrée. Par terre Jean avait laissé un sac-à-dos.

— Il reviendra ! se dit-elle, il me reviendra, même si ce matin, il est encore avec sa femme.

Adèle se décide enfin à quitter cette porte qui ressemblait trop à un miroir triste.

Elle fit demi-tour, entra dans la chambre, prit une serviette de bain, son jean et son pull et alla prendre sa douche.

 

Texte D

Réveil de Véronique

Véronique avait toujours eu du mal à abandonner son lit. En cette période de vacances avec ce beau soleil, elle s’était dirigée vers la porte-fenêtre de sa chambre pour regarder dans le jardin. Elle avait déjà ouvert les rideaux avant de se renicher un peu ; c’était une grosse dormeuse.

Minet en poussant la porte avait attiré son regard. Mal fermée elle séparait sa chambre d’ado du couloir qui menait à la cuisine. Une odeur de pain grillé avait envahi la chambre à l’entrée du minou.

Irait-elle avec le chat dans le jardin ou rejoindrait-elle sa mère dans la cuisine ? En voyant son reflet, elle se dit qu’elle avait eu raison de faire un brin de toilette et surtout de bien lisser avec sa nouvelle brosse ses beaux cheveux châtains avec ses reflets acajou. Elle les laissait pousser depuis son adolescent.

Il lui semblait bien avoir entendu un bruit : était-ce Stéphane qui était déjà là, pour lui proposer d’aller à la plage ? Dans ce cas, elle ne pourrait pas sortir, à peine couverte dans le jardin et Minet comme chaperon lui parut insuffisant.

Trois êtres au moins l’aimaient dans ce monde : Minet, sa mère et Stéphane. Elle avait envie de passer de belles vacances !

 

Texte E

Habillée à la hâte, elle admire son bébé encore endormi et réalise qu’elle est maman, heureuse, mais pleine de doutes quant à l’avenir ; sera-t-elle à la hauteur ? Et ce petit être pur va s’éveiller à la vie, ce seront des gazouillis, des sourires et il va se découvrir, reconnaître son entourage, les premiers pas.<

Viendront pour cette maman les soucis de l’avenir de son enfant : santé, études, fera-t-il du sport ? Dans quelle branche se destinera-t-il ? Tout cela est bien prématuré. Soyons heureux de cette naissance et jouissons de cet évènement, faisons en sorte de lui donner du bonheur, en lui inculquant les bonnes bases pour une parfaite réussite de sa vie d’adulte.

 

Texte F

J’adore les animaux sauvages pour cela : voilà la fin de vie d’un lion que l’on s’attend d’habitude à voir dans la savane.

Simba est en retraite et provient d’un cirque désaffecté.

Il a été adopté par une famille ayant les moyens de l’accueillir ; au sein de cette famille vit Julie une petite fille de sept ans, elle est devenue complètement amoureuse de ce lion qui avait aussi été élevé avec une autre petite fille. Chaque jour il se retrouvait avec des caresses, des mamours, sous l’œil inquiet et vigilant du papa. Cette histoire se passe à la campagne avec en toile de fond une propriété de plusieurs hectares avec une clôture aux normes ; mais Simba lui aspire toujours à la liberté et a été entraîné pour faire des sauts.

Malheureusement, un jour le roi de la jungle a réussi à franchir l’obstacle qui le séparait de la liberté. Il a été rattrapé, enfermé, puis réexpédié dans la savane.

Chaque année, Julie se rendait là-bas pour le revoir et comme c’était un lion relativement jeune, il a pu refaire une famille.

Un jour, Julie est revenue avec un bébé pour mettre à la place du papa et l’élever dans de bonnes conditions avec plein de câlins.

 

Texte G

Une histoire chouette

Elsa a dix ans et vit dans une maison près de la forêt. Son papa est garde-forestier, elle adore l’accompagner pour observer les animaux.

Après le passage d’un bûcheron, elle découvre au pied d’un grand sapin une petite boule blanche et s’aperçoit qu’il s’agit d’un bébé oiseau. Son papa lui a toujours expliqué qu’on ne devait pas prendre les animaux sauvages pour les ramener à la maison. Le bébé tout tremblant lui fait pitié en ce mois de février. Il est condamné, elle en est certaine ; il va mourir de froid ou être mangé par un renard. À l’insu de son père, elle le ramasse et le ramène chez elle, dans une petite cabane que son papa lui a construite, c’est son domaine. Une boîte en carte, quelques feuilles lui serviront de nid. Le plus difficile reste à faire : quel est cet oiseau ? Comment le nourrir ?

Elsa ferme la cabane, rentre à la maison et s’installe devant l’ordinateur : c’est une chouette hulotte dont le duvet est blanc les premiers jours. Sa nourriture : des souris, mais elle est encore trop petite ; pour l’instant, elle se contentera de steak haché, il y en a dans le frigo.

Pendant plusieurs semaines, Elsa s’est occupée de la petite chouette qui lui montrait son affection en lui caressant la main avec son bec et Elsa lui faisait des papouilles sur la tête. Vint le moment où il fallut trouver des souris, car la gourmande avait très faim. Elle réussit à en découvrir autour des tapettes dans le bâtiment.

La petite chouette commençait à voler, à se promener sur l’épaule d’Elsa qui lui apprit aussi à chasser en accrochant une souris morte au bout d’une ficelle. La petite fille savait qu’il fallait la relâcher maintenant, ce qu’elle fit un jour de soleil mais avec un pincement au cœur.

Depuis, chaque soir, un oiseau silencieux survole sa maison et Elsa se dit que c’est peut-être sa petite chouette.

 

Texte H

— Demain, c’est jour de grande marée, dit mon père, il fera beau ; si on allait à la pêche ?

L’idée fait l’unanimité. En cette période de vacances, la maison est pleine : enfants, petits-enfants, oncle, tante, cousins, cousines.

Le lendemain, une longue file s’étire sur le sentier qui mène au lieu de pêche. Arrivé à bon port, chacun prend son matériel, seaux, crocs, râteaux, et s’élance vers son coin préféré. Il y a ceux qui vont aux tourteaux, étrilles, ormeaux. Nous, les enfants, suivons mon père armé de son croc, nous nous dirigeons vers les rochers ; il commence à tâtonner à la recherche de son poisson roi : le congre. Après plusieurs essais, nous entendons un bruit sourd.

— Il y en a un ici, et je crois qu’il est gros, dit mon père.

Alors commence le combat entre la bête et l’homme. Mon père avance le croc doucement, le congre attaque l’engin qui envahit son espace.

La danse peut durer toute la marée. Tout d’un coup, nous entendons un grand remous.

— Ça y est, je le tiens, préparez-vous.

Aussitôt nous montons sur le rocher et nous préparons nos manches d’haveneau. Mon père s’accroche à son anse et tire doucement vers lui ; le congre se débat de toutes ses forces. Enfin il sort, aussitôt il est lancé sur le rocher où nous sommes perchés et c’est alors une véritable sarabande autour de lui.

— Tapez-lui sur la queue, ça le paralyse.

Tout à coup la bête s’immobilise et devient flasque, l’homme a gagné. Nous revenons et traversons la grève tout fiers, le congre en travers des épaules de mon père, il fait au moins 1 mètre 70 et pèse dix à douze kilos.

Nous croisons d’autres pêcheurs à pied qui saluent mon père et lui disent  :

— T’as encore eu une belle bête, François, et c’est bien toi le roi.

Nous, les enfants, nous redressons comme si les compliments étaient pour nous. Mon père me prend la main, et s’il est le roi, moi, à ce moment-là, je sais que je suis sa reine.

 

Renseignements et inscription

Jean-Patrick : 06 74 15 35 91